Mon enfant de moins de 6 ans se met vite en colère pour des raisons banales, comment l’aider ? 

Travailler sur la régulation émotionnelle avec votre enfant en dehors des crises est essentiel pour lui permettre de mieux comprendre, gérer et exprimer ses émotions au quotidien. Ce processus, qui inclut l’identification des émotions, l’anticipation des situations à risque et l’apprentissage de stratégies de gestion, contribue à renforcer sa confiance et son bien-être émotionnel.


Travailler la régulation des émotions avec votre enfant en dehors des crises 


1- Explorer les émotions avec votre enfant

# Aider votre enfant à identifier et nommer ses émotions. Pour cela, faites une liste d’émotions de base: joie, colère, tristesse, peur, surprise, dégoût, et décrivez en quelques mots et avec des exemples chacune des émotions. Pour les plus petits, vous pouvez utiliser des dessins comme des smileys.                   

# Apprenez lui ensuite à évaluer l’intensité de son émotion par exemple en utilisant un code couleur : vert (émotion la moins intense), jaune, orange, rouge (émotion la plus intense).

# Encourager le partage d’émotions au quotidien lors des repas ou avant le coucher par exemple. Montrez l’exemple en prenant un moment pour parler de vos émotions de la journée en expliquant ce que vous avez ressenti et comment vous y avez fait face.

2- Repérer les situations à risques 

Identifier les situations qui déclenchent des réactions émotionnelles intenses chez votre enfant est une étape clé pour l’aider à mieux les gérer. Ces déclencheurs peuvent inclure les moments de fatigue, de frustration face à une tâche difficile, des conflits avec des camarades, ou des environnements bruyants et surstimulés. Prenez le temps d’observer son comportement au quotidien et discutez avec lui pour comprendre les moments où il se sent particulièrement stressé, en colère ou débordé.

3- Techniques de régulation

# Encouragez votre enfant à exprimer ses émotions avant qu’elles ne deviennent ingérables. Apprenez-lui à utiliser des mots pour dire : « Je commence à me sentir énervé » ou « Cette situation m’inquiète », afin qu’il puisse verbaliser ses besoins et chercher une solution avec votre soutien. Votre enfant peut aussi vous donner l’intensité de son émotion selon l’échelle couleur pour que vous puissiez plus facilement comprendre dans quel état émotionnel il est. 

# Pour les situations à risque que vous avez identifiées avec votre enfant, vous pouvez mettre en place des solutions pour les anticiper. Par exemple, si les devoirs sont une source de frustration, établissez une routine claire avec des pauses régulières pour alléger la charge émotionnelle. Si ce sont des conflits à l’école qui peuvent le déborder, vous pouvez travailler ensemble sur des stratégies qu’il pourrait utiliser pour se défendre calmement ou demander de l’aide. Vous pouvez aussi utiliser des outils visuels comme un tableau ou un planning pour l’aider à se préparer à des évements potentiellement stressants (avec la possibilité d’indiquer le code couleur de l’intensité pour chaque evenement). Discutez à l’avance de la manière dont il pourrait gérer ses émotions dans ces moments. En anticipant, il peut mieux se préparer mentalement et émotionnellement.

# Enseigner à votre enfant des techniques de respiration pour calmer ses émotions comme la respiration en carré. Cela consiste à imaginer un carré, dont chaque côté est associé à une action (inspirer-retenir le souffle-expirer-retenir le souffle). 

# Demander à votre enfant s’ il à identifié lui-même des stratégies qui lui permettent de se calmer comme crier dans un coussin, taper des pieds, s’isoler.

# Une bonne hygiène de vie joue un rôle fondamental dans la régulation émotionnelle, car elle influence directement le fonctionnement cérébral et le bien-être général. Le manque de sommeil peut accentuer l’irritabilité, réduire la tolérance au stress et altérer la capacité à gérer les émotions. De plus, l’exercice physique améliore également la gestion des émotions en réduisant l’anxiété et en augmentant la résilience face aux défis.

# Consulter un professionnel de santé si besoin : consulter un psychologue ou pédopsychiatre si la dysrégulation émotionnelle perturbe gravement le quotidien de l’enfant.


Lorsque la crise arrive malgré tout … 


Si malgré toutes les stratégies travaillées en amont avec votre enfant, il fait une crise où il est submergé par ses émotions, vous devez réagir et l’aider à se calmer.

1- Restez calme: Votre propre réaction influence celle de votre enfant. Montrez-lui que vous êtes en contrôle de vos émotions, même si la situation est difficile. Adoptez un ton apaisant. Pendant une crise, l’enfant est submergé par ses émotions et n’est pas en mesure de réfléchir ou de discuter rationnellement. Gardez les explications et les discussions pendant un moment où il est calme.

2- Sécurisez l’environnement: Assurez-vous que votre enfant ne risque pas de se blesser ou de causer des dégâts matériels. Si nécessaire, emmenez-le dans un endroit calme où il peut exprimer ses émotions en toute sécurité.

3- Reconnaissez et validez ses émotions: avec des phrases comme “je vois que tu es en colère”, “je comprends que tu ne sois pas content de devoir arrêter ton jeu”. 

4- Arretez les gestes agressifs s’ il y en à : en lui rappelant qu’ils ne sont pas tolérables “tu as le droit d’être en colère, mais tu arrêtes de me jeter des jouets au visage”. 

5- Utilisez des techniques de régulation immédiate des émotions pour aider votre enfant à se calmer: 

# Des exercices de respiration comme la respiration en carré expliqué précédemment, ou encore l’exercice de la bulle d’air ou l’enfant visualise une bulle qui monte (l’enfant inspire) et descend (l’enfant expire) pendant plusieurs minutes. 

# Des objets apaisants : comme un doudou ou autre objet familier qui peut rassurer l’enfant. 

# Décharger le surplus émotionnel en faisant une activité physique : Se dépenser physiquement peut aider votre enfant à se calmer plus rapidement, par exemple avec le jeu des feux bicolores: feu vert votre enfant doit courir, feu rouge il doit s’arrêter. 

Une fois la crise passée, discutez avec votre enfant de l’événement. Essayez de le faire verbaliser ce qu’il à ressenti sur le moment, et trouvez avec lui des idées pour que ça ne se reproduise pas. 

En offrant à votre enfant des outils et un environnement propice pour explorer ses émotions, vous l’aidez à développer des compétences essentielles pour faire face aux défis de la vie. Ces efforts, renforcés par une hygiène de vie adaptée et un soutien bienveillant, lui permettront de grandir en harmonie avec lui-même et avec les autres.


Références

Auteurs

Alicia COHEN-FREOUA
Psychiatre

Richard DELORME
Chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, Psychiatre

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