Mon enfant  s’isole, me raconte des choses inhabituelles et étranges. Est-ce une schizophrénie débutant dans l’enfance ?

Les changements de comportements importants chez un enfant ou un adolescent sont très stressants pour les parents : retrait social, discours inhabituel dont on suit mal la logique, bizarrerie, propos étranges, rupture brutale avec le fonctionnement antérieur. Il n’est pas toujours simple de faire la part entre une crise passagère, un changement lié à l’adolescence et un trouble psychiatrique plus sévère. La schizophrénie débutant dans l’enfance, bien que rare en particulier avant 15 ans (exceptionnelle avant 13 ans), mérite une attention particulière compte tenu des risques : passage à l’acte violent contre soi ou contre les autres, mise en danger (fugue, acte répréhensible par la loi). 

Le terme schizophrénie fait très peur et est souvent mal compris car décrit dans les médias, comme une sorte de  dédoublement de personnalité.



Plusieurs éléments peuvent aider à mieux comprendre la situation :

  • Les facteurs liés au développement précoce
    Certaines complications pendant la grossesse ou à la naissance, ou la présence d’un trouble du neurodéveloppement, peuvent également accroître la vulnérabilité à la schizophrénie à début précoce.
  • L’âge et le sexe de l’enfant
    La schizophrénie est exceptionnelle avant 13 ans et reste rare avant 15 ans. Lorsqu’elle survient, elle apparaît en général plus tôt chez les garçons (avant 18 ans) et plus tard chez les filles (souvent après 18 ans).
  • Le début des symptômes
    Chez l’adulte, la maladie peut débuter brutalement, comme un « coup de tonnerre dans un ciel serein ». Chez les enfants, c’est souvent différent : les symptômes peuvent s’installer progressivement, avec d’abord des signes discrets comme le retrait social ou une perte d’intérêt (appelés symptômes négatifs).
  • La présence d’un facteur déclenchant
    Un stress important (déménagement, examen scolaire, séparation familiale) peut parfois précipiter l’apparition des troubles, même si ces événements sont fréquents et pas spécifiques.
    La consommation de cannabis, surtout avant 16 ans, est en revanche un facteur déclenchant reconnu. Lorsqu’un adolescent présente soudainement une rupture dans son fonctionnement habituel (idées étranges, perte de contact avec la réalité…), il est important de vérifier l’éventuelle consommation de substances : des tests urinaires peuvent être nécessaires.
  • Les antécédents familiaux
    La présence de cas de schizophrénie ou de troubles psychiatriques sévères dans la famille augmente le risque de développer la maladie.


Si vous observez plusieurs de ces éléments, surtout s’ils apparaissent brutalement, consultez sans tarder votre médecin ou un spécialiste.

  • Le discours a changé de façon nette : l’enfant parle de complots, de messages divins, de missions extraordinaires, ou se croit une personnalité importante.
  • Il peut affirmer qu’on veut lui faire du mal (profs, camarades) ou qu’on complote contre lui.
  • Vous surprenez parfois votre enfant à faire de longues pauses en conversant, comme s’il « écoutait quelqu’un ». Cela évoque des hallucinations auditives (entendre des voix).
  • Il peut dire qu’il se sent « guidé » ou qu’une voix lui parle dans la tête. Ces expériences sont souvent très angoissantes pour l’enfant : il signale peur, menaces ou insultes provenant des voix.
  • Changement brutal dans les soins personnels : il se lave moins, porte des vêtements sales, se néglige.
  • Isolement social marqué : il se renferme, parle beaucoup moins, met longtemps à répondre ou reste silencieux pendant de longues périodes.
  • Perte d’intérêt pour ses activités habituelles : plus envie de voir ses amis, reste enfermé dans sa chambre.
  • Troubles du rythme veille-sommeil : sommeil diurne, errance nocturne, sorties limitées au strict nécessaire (manger).
  • Le langage devient confus, les propos paraissent illogiques ou difficiles à suivre.
  • Changements d’attitude ou d’apparence soudains (style vestimentaire très différent, coupe de cheveux radicale).
  • Comportements étranges ou impulsifs : idées ou actes qui surprennent l’entourage.
  • Scarifications, paroles ou gestes auto-agressifs.
  • Possession ou dissimulation d’objets dangereux (couteau, arme) ; propos menaçants envers autrui.


Oui, si on ne fait rien.
La schizophrénie à début précoce entraîne une souffrance importante pour l’enfant ou l’adolescent. Entendre des voix, avoir la conviction d’être menacé ou manipulé… tout cela provoque une grande détresse. Sans prise en charge, il existe un risque de passage à l’acte. Ainsi, l’enfant peut se faire du mal (scarifications, fugues, tentatives suicidaires) ou mettre les autres en danger (comportements agressifs, actes répréhensibles par la loi). C’est pourquoi il est essentiel d’agir vite.

Non, si on agit rapidement.
Lorsqu’un professionnel de santé est consulté et qu’une prise en charge est mise en place sans attendre, le pronostic est bien meilleur. Un accompagnement précoce permet de réduire la souffrance, de limiter les risques et d’améliorer la trajectoire de l’enfant. Pour en savoir plus, consultez la fiche : « La schizophrénie dans l’enfance : que faire ? »



La schizophrénie ne provient pas d’une cause unique, mais résulte de la combinaison de plusieurs facteurs. Aucun de ces facteurs, pris isolément, n’entraîne la maladie, mais leur accumulation augmente le risque. Ces facteurs de risque sont multiples et indépendants de la volonté de l’enfant ou de ses parents. La schizophrénie n’est jamais causée par un style éducatif ou un environnement familial particulier. 

En conclusion, la schizophrénie débute dans l’enfance (avant 15 ans). C’est un trouble rare, mais qui peut avoir un retentissement important sur la vie de l’enfant et de sa famille. Plus les signes sont repérés tôt, plus la prise en charge peut être mise en place rapidement. Cela permet d’améliorer le quotidien de votre enfant.

N’hésitez pas à consulter votre médecin ou votre pédiatre. Parfois eux aussi disent ne pas savoir quoi faire et vous orientent vers un psychiatre de l’enfant. Cependant consulter permet avant tout de comprendre la situation, de distinguer ce qui relève d’une difficulté passagère et ce qui nécessite un suivi spécialisé.

Un repérage précoce et un accompagnement adapté sont essentiels pour favoriser l’évolution et le bien-être de votre enfant.

Dans la prochaine fiche, vous découvrirez des conseils pratiques et accessibles que vous pouvez appliquer au quotidien pour soutenir votre enfant, l’aider à se sentir mieux et favoriser son développement. Ces stratégies peuvent être utiles aussi bien avant qu’un traitement médicamenteux ne soit prescrit que pendant le suivi des soins.

Consulter notre fiche 2 sur la schizophrénie à début précoce.

Consulter nos autres fiches et vidéos.


Références

Auteurs

Pierre ELLUL
Psychiatre

Alicia COHEN-FREOUA
Psychiatre

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