Qu’est-ce-que l’attention?

Rédigé par Dr Eric Acquaviva, Dr Benjamin Landman, Dr Ana Moscoso (pédopsychiatres), Marion Socodiabehere, Véronique Faurant (psychologues) - Centre d’Excellence InovAND, Hôpital Robert Debré, Paris et Jérôme Sackur - Laboratoire de Sciences Cognitives et Psycholinguistique, (CNRS / École Normale Supérieure / École des Hautes Études en Sciences Sociales)

Mieux comprendre le rôle de l’attention dans le TDAH de son enfant.

Au delà de la question du Trouble du Déficit de l’Attention – Hyperactivité traitée dans la fiche précédente, le sujet de l’attention chez l’enfant est omniprésent dans notre quotidien : en famille, à l’école, sur les bulletins scolaires, en lien avec l’évolution de nos modes de vie ou lors des consultations médicales : « sois attentif », tel enfant « n’est pas concentré », il est « dans la lune », « dans les nuages », « rêveur », il « zappe».

Mais la définition et les situations auxquelles nous renvoient ces termes peuvent paraître floues, que ce soit pour les parents, pour les professionnels de santé parfois et encore plus … pour les enfants concernés. 

L’objet de cette fiche est de donner, le plus simplement possible, des précisions sur ce qu’est le processus de l’attention, comment il fonctionne et se développe.

Avant tout, voyons ce qu’est l’attention et la définition qui en est donnée ?

De nombreuses définitions de l’attention sont proposées. Elles insistent toutes sur deux points essentiels. L’environnement immédiat est toujours source de très nombreuses stimulations, notre propre esprit produit sans cesse des souvenirs ou anticipe le futur… Face à cet afflux, l’attention permet :

  • D’éliminer les informations non pertinentes ;
  • Et de sélectionner les informations à traiter.

C’est pourquoi l’attention est parfois comparée à un “filtre” cognitif. 

Nous retiendrons la définition du Professeur  Stanislas Dehaene (professeur au collège de France) qui définit l’attention comme  «l’ensemble des mécanismes par lesquels le cerveau sélectionne une information et en oriente le traitement. »

Mais pour être plus concret et mieux percevoir ce qu’est l’attention, voyons à quoi elle sert dans notre quotidien ? 

 

  • L’attention c’est avant tout ce qui permet à l’enfant d’être connecté à son environnement : on comprend bien que pour capter l’information et la traiter, il faut que l’enfant soit « connecté » à la source de l’information : « le parent, l’enseignant, etc .. ». Or, ce sont les interactions avec son environnement qui vont permettre à l’enfant le développement de ses acquisitions (comme le langage ou la motricité) et de ses apprentissages. L’attention est donc une fonction cognitive essentielle au développement de l’enfant. Stanislas Dehaene la considère comme l’un des piliers des apprentissages. 
  • Les capacités attentionnelles sont également très importantes pour la socialisation. En effet, pour s’intégrer au groupe, un enfant doit écouter ce que l’autre dit, prêter attention aux émotions de ses amis,  se retenir de ne pas couper la parole, ne pas se laisser distraire par les autres camarades, etc …  Les difficultés attentionnelles peuvent donc aussi se révéler par leur impact sur la vie sociale.

 

Comment fonctionne l’attention ?

Un certain nombre de conditions sont nécessaires au processus d’attention. Michael Posner, psychologue américain et chercheur dans le domaine de l’attention, distingue ainsi trois processus mentaux correspondant à trois réseaux cérébraux qui fonctionnent en collaboration: 

Dans la vie quotidienne le contrôle exécutif est impliqué dans plusieurs comportements que vous pouvez observer chez votre enfant :

    • Le contrôle inhibiteur qui va permettre de “bloquer” la réponse spontanée et impulsive pour privilégier la meilleure stratégie. Par exemple, je “bloque” mon envie de manger mon pain au chocolat avant de l’avoir acheté. 
    • La régulation des émotions – qui permet de moduler la réponse émotionnelle comme la tristesse, la colère ou la peur. 

Tous ces processus s’acquièrent au fil du développement de l’enfant : les capacités attentionnelles et exécutives d’un enfant vont donc dépendre de son âge.

Voyons maintenant quelles sont les étapes du développement de l’attention ?

 

  • Jusqu’à l’âge d’un an, l’enfant va essentiellement s’attacher aux  signaux présents dans  son environnement. Un jouet va lui être tendu, un sourire va lui être fait et l’attention va se porter spécifiquement sur ces stimulations. Posner décrit alors le nourrisson comme « une machine à regarder ». À ce moment, l’attention “exogène”, provoquée par des stimluli externes, domine.. C’est ainsi que se développe le réseau de l’attention dite sélective
  • Entre un an et 18 mois, l’enfant va progressivement développer l’attention dite “endogène”, qui est volontaire, dirigée par le sujet en fonction de son projet, de sa motivation. L’enfant pourra progressivement chercher du regard un sujet d’attention (une image qu’il apprécie, un jouet préféré, etc …). Ces capacités attentionnelles vont ensuite se renforcer tout au long du développement de l’enfant.
  • Les capacités à moduler son attention en fonction de la motivation et des situations, à alterner son attention en fonction de différentes cibles se développent elles aussi progressivement avec l’âge. 
  • La durée du maintien de l’attention par les processus de contrôle exécutif dépend également de l’âge. Il est néanmoins difficile de donner une durée précise en fonction de l’âge tant cela dépend des modalités attentionnelles sollicitées, du moment de la journée, du contexte, du stimulus, des distracteurs… A titre d’indication, il est parfois indiqué que cette durée serait de moins de 10 minutes avant 3 ans et de 40 minutes à l’âge de 10 ans. Mais, encore une fois, ces chiffres sont à prendre avec prudence. Pour l’instant, aucun protocole scientifique rigoureux n’existe pour préciser ces intuitions.

De manière générale, l’ensemble de ces capacités attentionnelles vont se renforcer avec le développement et la maturation cérébrale.

Comment l’attention est-elle évaluée ?

Ces différentes modalités attentionnelles peuvent être évaluées par des tests neuropsychologiques, les plus connus étant le TEA-CH (Test d’Évaluation de l’Attention chez l’enfant) et la NEPSY (acronyme de NEuroPSYchologie) ou le CPT (Continuous Performance Task). Ces tests possèdent des normes en fonction de l’âge de l’enfant. Les difficultés attentionnelles individuelles vont donc être définies en fonction de l’âge et souvent en comparaison à ces normes. 

Cependant des difficultés attentionnelles dépistées dans un contexte de test ne signifient pas automatiquement que cet enfant a un diagnostic de Trouble du Déficit de l’Attention. C’est un des éléments du diagnostic mais non suffisant.  C’est néanmoins utile dans le cadre de la démarche diagnostique comme évoqué dans la fiche précédente.

Conclusion:

Nous espérons qu’une meilleure compréhension des processus attentionnels, de leurs développements et de leurs fonctionnements permet de mieux appréhender la place de l’attention dans le quotidien de votre enfant.

 

Références:

Dehaene, S. (2014a). Fondements cognitifs des apprentissages scolaires : l’attention et le contrôle exécutif. Collège de France. Collège de France.

Dehaene, S. (2014c). Les grands principes de l’apprentissage. Collège de France.

Posner, M. I. (2011). Attention in a social world. Oxford University Press.

Lachaux, J. P. (2016). Les petites bulles de l’attention: se concentrer dans un monde de distractions. Odile Jacob.

 

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