Repérage des symptômes de stress ou de détresse psychologique chez l’enfant (Fiche parents)

Rédigé par Marina Dumas, Hélène Poncet-Kalifa (psychologues), Elie Khoury, Coline Stordeur, Alexandre Hubert, Benjamin Landman, Hugo Peyre et Richard Delorme (pédopsychiatres). Centre d’Excellence des troubles du Neurodéveloppement, Hôpital Robert Debré, Paris.

Anxiété et troubles de l'humeur
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Vous connaissez les réactions habituelles de votre enfant face au stress

# Au quotidien, lorsque votre enfant est confronté à des situations stressantes, vous avez déjà pu observer des modifications passagères de ses émotions (tristesse, irritabilité ou colère) ou de son comportement (repli, agressivité ou pleurs). Très souvent, ces réactions aux petits stress du quotidien sont sans gravité et disparaissent spontanément.

# Les derniers mois ont pu être particulièrement stressants pour votre enfant (et pour toute la famille). Durant cette période votre enfant a pu être confronté lui aussi à un stress continu au cours des différentes semaines. Parfois il a eu du mal à s’adapter à ces nouveaux stress sans que ni vous ni lui ne vous en aperceviez initialement. Puis d’un seul coup, ça fait ‘tilt’ : il y a un truc qui n’est pas comme d’habitude et ça dure.

# Parfois ces stress ont été malheureusement plus aigus et plus intenses également. Ces symptômes sont plus faciles à repérer car ils apparaissent lors de situations très précises où il y a une mise en danger vital (ou considérée comme telle par votre enfant).

# Ces stress continus ou aigus entraînent parfois des réactions inhabituelles chez votre enfant que ce soit dans la durée ou l’intensité. Vous pouvez considérer ces changements comme des signaux que votre enfant envoie pour indiquer qu’il a besoin d’aide pour y faire face.

Repérer les réactions de votre enfant face à un stress continu

# Les situations qui constituent un stress continu pour les enfants sont celles qu’ils rencontrent dans leur environnement proche, comme :

Un changement important de l’organisation quotidienne : dans le contexte sanitaire actuel, ça peut être des difficultés pour s’adapter aux nouvelles contraintes d’emploi du temps, de devoir porter un masque dans la rue ou à l’école, de ne plus pouvoir jouer avec ses amis comme avant (respect des gestes barrières).

Un changement important de l’organisation familiale : déménagement, changement d’école ou de professeur, divorce, mariage ou décès. Une grossesse, l’arrivé d’un petit frère ou d’une petite sœur également peut constituer un stress important

# Face à un stress continu, vous avez pu remarquer l’un ou plusieurs de ces trois modes d’expression chez votre enfant :

L’irritabilité : votre enfant peut devenir plus impulsif, répondre de façon agressive ou tendue. Dans certaines situations vous avez pu observer des crises de colère ou des changements rapides de comportement. Il peut passer du calme à l’agitation, du rire au calme, des pleurs à l’agressivité. Jouer avec lui devient difficile car il perd vite patience. Ce n’est clairement plus le même enfant. Il n’a plus beaucoup de tolérance avec ses frères et sœurs. Il se chamaille beaucoup plus avec eux.

La tristesse : votre enfant peut s’isoler, se replier sur lui-même ou avoir des crises de larmes. Le plus souvent la tristesse est difficile à repérer chez l’enfant. Les enfants expriment leur tristesse par une certaine passivité, un désintérêt pour les activités du quotidien, un manque d’entrain. Votre enfant peut également dormir moins bien, manger trop ou pas assez. Sur le plan émotionnel, il exprime moins de joie au quotidien. Parfois, il peut être plus en recherche d’attention, de contact physique. Il peut aussi régresser dans ses acquis et demander de l’aide pour s’habiller, se laver ou encore faire de nouveau pipi au lit alors que ce n’était pas arrivé depuis longtemps.

L’angoisse : votre enfant peut sembler soucieux, exprimer des inquiétudes ou paraître hyper-vigilant à son environnement (il est sur le qui-vive). Là encore les symptômes ne sont pas toujours évidents à percevoir. Les enfants rapportent rarement des sensations de crise d’angoisse (cœur qui bat fort, mains en sueurs, etc…), mais ils peuvent facilement avoir des plaintes physiques : maux de têtes, maux de ventre, diarrhée. Ils peuvent se montrer plus craintifs que d’habitude. Vous pourrez aussi remarquer des problèmes de sommeil avec des cauchemars, un endormissement difficile, des allers-retours entre le lit et les parents pour des demandes multiples, voire un besoin excessif ou inhabituel d’être rassuré.

Même lorsque le facteur de stress n’est plus là, le comportement peut mettre du temps à revenir à la normale. Pour certains enfants cela peut prendre plusieurs semaines (ou mois).

Réactions de votre enfant face à un stress aigu et intense

# Si votre enfant a été exposé à un stress aigu et intense, cela a pu dans certains cas générer un traumatisme et entraîner un état de sidération anxieux important.

# Vous avez des raisons de penser qu’il s’agit d’un traumatisme si vous observez les difficultés suivantes chez votre enfant :

● Des pensées répétées centrées sur l’événement pendant la journée ou des cauchemars pendant la nuit. Vous pouvez aussi observer une tendance à répéter des jeux ou à reproduire des dessins tournant autour d’un aspect particulier de l’événement.

● Un évitement des personnes, situations ou objets qui lui rappellent l’événement.

● Une irritabilité, des difficultés de concentration et de sommeil. Cela peut parfois s’accompagner d’une attitude “régressive”, les parents ayant l’impression que leur enfant retrouve un comportement qu’il avait à un âge plus jeune (pleurs, caprices, attitude adhésive, pipi au lit…).

● Un état de nervosité. Votre enfant est sur le qui-vive et se tient constamment sur ses gardes.

Ces indicateurs de traumatisme débutent habituellement immédiatement dans les jours qui suivent un stress aigu et intense.

Il faut être particulièrement vigilant à ces indicateurs de traumatisme en raison du risque de persistance de ces difficultés chez certains enfants (on parle alors de syndrome de stress post-traumatique).

Que faire : je mesure l’intensité/la fréquence, l’évolution, le retentissement des symptômes que j’observe

*Critère 1 – Intensité/fréquence : Est-ce que j’observe beaucoup de ces « clignotants » ou signes d’alerte chez mon enfant ? Est-ce que je les observe de nombreuses fois au cours de la journée ? *Critère 2 – Evolution : Comment cela évolue-t-il ? Y en a-t-il de plus en plus ou de moins en moins à mesure que les jours se succèdent ? *Critère 3 – Retentissement : Et enfin, quel est le retentissement de ces difficultés sur la vie de tous les jours de mon enfant, sur sa disponibilité dans le quotidien, sur ses relations avec moi, ses frères/ sœurs ? Ai-je le sentiment que cela va de pire en pire ? A l’aide des petites réglettes ci-dessous, vous pouvez essayer de quantifier ces différents critères :

Critère 1 : Intensité/fréquence : Est-ce que j’observe beaucoup de ces signaux d’alerte ?

détresse psychologique - critère 1

Critère 2 : Évolution : Y-a-t-il de plus en plus OU de moins en moins de ces signaux d’alerte à mesure que les jours se succèdent ?

détresse psychologique - critère 2

Critère 3 : Retentissement sur la vie à la maison, sur ses relations à la maison, sur son autonomie

détresse psychologique - critère 3

Je calcule le score total et je réagis

BILAN : j’additionne les scores au 3 échellesAttention si score > à 7 sur 1 ou 2 échelles alors le bilan est rouge aussi

VERT : Ce que vous pouvez faire en tant que parents pour prévenir des réactions de stress chez votre enfant :

Pour le moment, les signes de mal-être que j’ai perçus sont légers et diminuent spontanément. Je reste attentif pour voir comment cela évolue. Cependant je décide de :

# Maintenir une organisation structurée du quotidien

● Maintenir des horaires réguliers du coucher et du lever. Cette routine renforce le sentiment de stabilité dont votre enfant a besoin en ce moment. Petite astuce pour diriger ses pensées vers un havre de paix : le soir avant de s’endormir, demandez-lui de vous raconter trois choses agréables de la journée !

● Structurer la journée. La planification aide à (re)construire ses repères. Pensez à alterner des activités stimulantes avec des moments de calme. Vous pouvez télécharger et imprimer un joli planning de la journée avec des idées d’activités ici : https://yapouni.com/strategies-et-outils-pour-maintenir-la-routine-de-votre-enfant-sur-le-long-terme/

● Reprendre les activités habituelles ou créer de nouvelles activités ludiques. Il est très important de remettre en place des perspectives agréables pour votre enfant. Demandez-lui ce qu’il a envie de faire. Passer du temps avec lui. Essayez de dégager du temps pour chaque enfant de la maison, chaque jour. Ne vous fixez pas des objectifs impossibles, le plus important c’est la qualité de l’échange. Montrez à votre enfant que vous êtes là pour lui.

# Favoriser les relations avec les amis et la famille

● Encouragez votre enfant à échanger avec autrui, et notamment privilégiez les contacts directs. Il est réconfortant pour lui de se rendre compte qu’il n’est pas seul face à la situation stressante et que ses pairs comprennent et partagent ses ressentis.

● Les activités extérieures avec des amis de votre enfant sont à privilégier – dans le respect des gestes barrières.

ORANGE : Ce que vous pouvez faire en tant que parents face à des réactions modérées de stress chez votre enfant

# Ecouter votre enfant

L’enfant pourra d’autant mieux faire face à ses émotions qu’il sait les identifier, les verbaliser et les partager avec autrui.

● Il est important de dire à votre enfant que vous allez écouter ce qu’il va vous dire et qu’il a le droit de partager ses émotions, même s’il les perçoit comme très négatives, lourdes ou honteuses. Quand on exprime une émotion à autrui, on la partage et cela libère d’un poids !

● Si votre enfant sait déjà identifier et verbaliser ses ressentis, manifestez votre disponibilité pour qu’il puisse exprimer son mal-être (par exemple, en constatant son état “je vois que tu es énervé” et en proposant de l’écouter “je suis là si tu veux partager ce qui te tracasse”).

● Pour les enfants qui ont encore besoin d’aide pour identifier ou nommer leurs états émotionnels, vous pouvez lire avec eux des livres parlant des émotions et leur proposer de se servir d’une boussole des émotions :

# Rassurer votre enfant

Pour réussir à se calmer et puis à développer des réponses adaptées face à une situation stressante, votre enfant a besoin avant tout de retrouver un sentiment de sécurité.

● Si l’événement stressant n’est plus d’actualité, expliquez-lui que le danger qu’il redoute a cessé d’exister, qu’il est dans le passé, que la vie reprend son cours.

● Si l’événement stressant est toujours en cours, assurez-lui que vous êtes là pour le soutenir, l’accompagner. Votre enfant a besoin de savoir qu’il n’est pas tout seul à y faire face et que vous, l’adulte, veillez à sa santé et à son bien-être.

# Aidez votre enfant à améliorer sa gestion des émotions.

L’anxiété devient plus envahissante lorsque l’enfant évite de s’y confronter, par exemple, en chassant des pensées désagréables ou en esquivant des situations qui les provoquent (quand vous essayez de ne pas penser à un ours polaire, son image émerge tout de suite dans votre esprit !).

Plusieurs approches permettront à votre enfant d’améliorer la gestion de ces émotions :

● Des exercices de relaxation qui aident à apaiser le corps et, par conséquent, l’esprit. Vous avez un large choix : la respiration anti-panique, la méditation guidée, les pratiques de relaxation active basées sur le contraste entre la tension et la détente des parties du corps… Pour retrouver plus de propositions et de ressources, cliquer ici & ici :

● La pratique sportive qui sert de “défouloir”, idéalement en extérieur et avec des enfants de son âge. C’est une recommandation de l’OMS : Le sport pour lutter contre l’anxiété

● Les activités agréables qui mettent l’enfant de bonne humeur, qui l’amusent et qui le détendent. Pour que l’anxiété diminue, il faut se focaliser sur des choses agréables, ce qui favorise le sentiment de bien-être. De ce fait, il y aura tout simplement moins de place pour l’anxiété ! Petite astuce : si une activité n’est pas encore disponible, imaginez ensemble comment l’enfant pourrait l’adapter à la situation actuelle.

● Le rire est un remède anti-stress très puissant. Faites un tour des comédies ou des dessins animés comiques. Attention : il est important de vérifier le contenu pour ne pas avoir une mauvaise surprise.

ROUGE : Ce que vous pouvez faire en tant que parents face à des réactions importantes de stress chez votre enfant

# Les stratégies que vous avez mises en place dans la situation Orange ne semblent plus fonctionner.

# Ne pas s’affoler ! Il faut essayer de consulter rapidement un professionnel de santé (médecin généraliste ou pédiatre) pour votre enfant, pour une orientation dans le dispositif de prise en charge dont il connaît l’organisation. Il pourra vous orienter rapidement vers les structures qu’il connaît.

# Dans le cadre des troubles que l’on appelle ‘d’adaptation’ les retours à un état de mieux-être peuvent être très rapides. Le pédiatre ou le médecin généraliste sont des professionnels. Ils voient beaucoup d’enfants et sauront apprécier la gravité et vous aider.

# Si besoin, vous pouvez voir un psychologue et un psychiatre pour votre enfant. Attention les listes d’attente peuvent être longues ! N’attendez pas un mois pour consulter un professionnel de santé. Voir le pédiatre ou le médecin généraliste est très efficace et vous apportera déjà des solutions dans l’attente du rendez-vous avec le psychologue ou le psychiatre.

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