Vous avez l’impression que votre enfant présente certaines de ces difficultés alimentaires :

  • Il n’accepte que certains goûts et /ou textures.
  • Il est réticent et refuse souvent de goûter de nouveaux aliments,
  • Il est inflexible sur le choix des marques ou des emballages
  • Il mange en très petite quantité
  • Il mange lentement, il se fatigue lors des repas
  • Il ne s’intéresse pas à l’alimentation
  • Il se montre réticent ou même refuse de venir à table

Ces difficultés persistent et compliquent le quotidien ? Vous cherchez des réponses et des stratégies efficaces ?

Ces difficultés pourraient s’apparenter à un trouble alimentaire souvent méconnu, appelé ARFID

arfid : c'est quoi



Les deux objectifs principaux de la prise en charge par l’orthophoniste ou le psychologue en collaboration avec le médecin psychiatre sont les  suivants :

  1. Développer la flexibilité chez l’enfant : c’est-à-dire être capable d’accepter des changements, être plus souple. Cette première étape est essentielle avant de travailler l’introduction d’un nouvel aliment.
  2. Améliorer la diversification alimentaire : c’est-à-dire être capable d’explorer de nouveaux aliments et de diminuer ce qu’on appelle la néophobie, c’est-à-dire, les réticences de l’enfant face à ce qui est nouveau pour lui.


A partir de ce qui fonctionne déjà bien, proposer de légères variations…
Plutôt que travailler directement sur l’introduction d’un aliment nouveau on va d’abord développer la flexibilité de l’enfant sur les comportements qui accompagnent tout repas, comme par exemple :

  • Proposer différents couverts (fourchette, petite/grande cuillère, pic ludique, couverts)
  • Proposer différents contenants (petite/grande assiette, bol, ramequin, etc.)
  • Boire à la paille, dans un verre, dans une gourde
  • Modifier la présentation dans l’assiette
  • Proposer un aliment d’une marque différente de d’habitude
  • Allonger/réduire la durée du repas
  • Changer de place assise à table

Ainsi, l’enfant s’habitue à vivre des situations de changements qui sont à sa portée et qui ne concernent pas directement ce qui est le plus difficile pour lui (les aliments en eux-mêmes). 

Par exemple : 

  • Boire un yaourt liquide à la paille ou dans un verre.
  • Verser une crème dessert dans un ramequin
  • Manger une crème dessert avec une grande cuillère 
  • Verser la compote en gourde dans un ramequin et la manger à la cuillère

Pour découvrir très progressivement un nouvel aliment on va décomposer en petites étapes le “chemin jusqu’à la bouche” (cela s’appelle aussi l’habituation sensorielle orale progressive)

Choisir un aliment avec la collaboration de l’enfant et réaliser successivement ces étapes : à l’aide du tableau, et avec votre enfant, cocher la case correspondant à l’action réussie.

tableau stratégie 1

Par exemple, choisissez un nouvel aliment que votre enfant se sent capable d’introduire dans son alimentation, comme ici la banane, et procédez de la façon suivante :

  • Banane sur la table
  • Banane proche de l’assiette pendant le repas
  • Eplucher la banane 
  • La découper avec un couteau 
  • La toucher avec les doigts
  • La déposer sur les lèvres 
  • La croquer puis recracher
  • La croquer puis mâcher puis recracher
  • La croquer puis mâcher puis avaler

Il est ensuite possible de faire la même chose avec d’autres fruits, légumes, produits laitiers, protéines, snacks salés, snacks sucrés, yaourts/compotes, desserts, etc.


Plusieurs variations sont possibles : 

A- Dans l’assiette, proposer 2 aliments (ou plus) déjà connus et appréciés mais que votre enfant n’a pas l’habitude de manger ensemble et inciter votre enfant à les mélanger . Ce travail permet à votre enfant de travailler sa flexibilité face au changement à partir d’aliments déjà connus. Il permet aussi de s’habituer à des changements minimes de textures ou de goût qui se présentent parfois lorsque l’on mélange deux aliments. 

Exemple : Proposer 2 sortes de pâtes appréciées dans l’assiette : coquillette + pâte alphabet. L’objectif est d’accepter un changement d’habitude. 

B- Proposer un aliment apprécié avec un nouvel aliment à découvrir. L’aliment apprécié va jouer le rôle d’aliment facilitateur.

Exemple : Proposer un aliment apprécié : les coquillettes, et y associer un nouvel aliment à découvrir : quelques petits pois. Ou mettre quelque chose d’apprécié : du ketchup ou du gruyère râpé sur le nouvel aliment à découvrir : du riz. L’objectif est d’introduire un nouvel aliment.

⚠ Restez vigilants sur les proportions : l’aliment à découvrir doit être présent en plus petite quantité  que l’aliment apprécié.

C- En commençant par une petite quantité, augmenter de manière très progressive la quantité de l’aliment à goûter.

Ce travail peut être réalisé avec des aliments solides mais aussi des aliments mixés ou liquides. On pourra par exemple introduire un nouveau parfum de sirop, des courgettes dans une purée de pomme de terre ou encore, dans l’objectif d’augmenter les apports énergétiques, introduire la consommation de lait entier à la place du lait écrémé …

  • A partir d’un verre de lait demi-écrémé, augmenter petit à petit la proportion de lait entier
  • A partir d’un verre d’eau nature, augmenter petit à petit la concentration de sirop de framboise
  • Dans une purée maison de pomme de terre, ajouter à chaque fois un plus gros morceau de courgette

L’objectif est d’augmenter progressivement la quantité du nouvel aliment. 


Technique n°4 : Le “chaînage alimentaire”  

Partir d’un aliment connu et apprécié de votre enfant en y faisant quelques légères variations, afin de l’accompagner vers un autre aliment. Dans le chaînage on part d’un aliment “confort”et on s’en éloigne petit à petit, en jouant sur les similarités.

Aliments acceptésAliments légèrement similaires
Chips de pomme de terreChips de légumes
SardineMaquereau
Compote de pommeCompote de pomme/poire
Frites de pomme de terreFrites de patate douce

Comment s’y prendre ?

  • Garder une caractéristique commune (texture, couleur, goût, etc.)
  • Réaliser la modification de façon très progressive : conserver une majorité d’aliments connus et acceptés dans l’assiette et ajouter petit à petit le nouvel aliment en augmentant légèrement la quantité à chaque nouvel essai (selon l’acceptabilité de votre enfant).
  • Proposer plusieurs essais : ne pas s’arrêter à un ou 2 essais

  • Respectez le rythme  de votre enfant, il n’est pas nécessaire d’augmenter trop vite la quantité du nouvel aliment.
  • Il est important que la présentation d’un  nouvel aliment soit répétée et progressive.
  • Encourager votre enfant à décrire ses nouvelles sensations autour des aliments introduits (odeurs, goûts, textures), un goût différent n’est pas forcément mauvais. 
  • Soyez vigilants sur vos réactions, surtout avec des enfants petits, une grimace de votre part à l’introduction d’un nouvel aliment pourrait contribuer à réduire l’aversion de votre enfant pour cet aliment.
  • Ces stratégies peuvent être couplées à un travail motivationnel sous forme de tableau à points (Motiver les changements chez son enfant ; le Tableau à économie de jetons)
  • Les récompenses peuvent être matérielles (ex. : un autocollant, des cartes Pokémon, etc.) mais il est fortement recommandé de privilégier les récompenses sociales (ex. : faire un jeu de société en famille, lecture d’histoire, etc.).
  • Veillez à choisir AVEC  l’enfant : l’aliment à découvrir et la récompense à obtenir

QUELQUES IDÉES ESSENTIELLES À GARDER EN MÉMOIRE 

  • Rappelez-vous que votre enfant présente des particularités sensorielles, ce qui paraît facile et évident pour vous ne l’est pas forcément pour lui. N’essayez pas de raisonner à la place de votre enfant, il est important d’adapter votre approche à ses besoins spécifiques. 
  • Récompensez les progrès : Félicitez l’enfant lorsqu’il fait des progrès, même s’ils sont minimes.
  • Célébrez les petites victoires pour l’encourager à continuer à explorer de nouveaux aliments. Noter les petites réussites dans un carnet permet souvent de valoriser les progrès réalisés et soutient la motivation.
  • Soyez patient : Ce processus peut être long et requiert de la patience. Il est essentiel de ne pas se décourager et de continuer à encourager l’enfant à progresser. 
  • Faites preuve d’innovation et de persévérance. …Mais vous avez aussi le droit  d’être fatigué et de ne pas avoir toujours l’énergie pour proposer de nouveaux défis, prenez du temps pour vous. 
  • L’accompagnement par un professionnel formé aux troubles de l’oralité (orthophoniste, ergothérapeute ou psychologue) favorise la réalisation de progrès au quotidien.
orthophoniste

Ne manquez pas nos vidéos en suivant ce lien.

Pour en savoir plus :

  • Néophobie alimentaire et troubles de l’oralité chez l’ado et l’adulte – M. Perchey
  • Les troubles de l’oralité alimentaire: Comprendre et accompagner son enfant – F. Challard, M. Poirette 
  • Troubles alimentaires pédiatriques : Les repas sont un calvaire : mon enfant mange mal. Comprendre le trouble alimentaire pédiatrique (ou trouble de l’oralité alimentaire) – L. Briatte, L.Barreau-Drouin 

Références

Auteurs

Nesrine Bouchlaghem


Rédigé par Chloé Porte (orthophoniste), Leïla Carletti (psychologue), Marie Hooreman (infirmière), Sarah Helbert (diététicienne),  Anaël Ayrolles (psychiatre), Coline Stordeur (pédopsychiatre)

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