Le sport et le TDAH

Rédigé par Dr Ana Moscoso, Dr Eric Acquavia (Pédopsychiatres), M. Fabien Richard (Psychologue), Mme Julie Chagneau (Psychomotricienne) et Mme Brigitte Lourtis (Orthophoniste)

Trouble du déficit de l'attention & hyperactivité
Sport

Ce que la plupart d’entre nous savons déjà -intuitivement et empiriquement- fait actuellement l’objet de nombreuses recherches dans la littérature internationale : l’exercice physique semble produire des effets bénéfiques sur plusieurs aspects des fonctions cognitives et émotionnelles pour les enfants en général et les enfants avec Trouble Déficit Attentionnel avec ou sans Hyperactivité (TDAH) en particulier.

 

  • Une récente revue systématique de la littérature et méta-analyse met en évidence la supériorité de la pratique du sport sur les fonctions dites ‘exécutives’ (Inhibition +++, Flexibilité +++, Attention ++, Mémoire de Travail ++) par rapport à d’autres interventions non-pharmacologiques pour le TDAH.

 

  • Une autre méta-analyse récente a, quant à elle, montré chez les patients avec TDAH la réduction de symptômes d’anxiété et dépression, de difficultés de socialisation et d’agressivité par la pratique du sport.

 

Nous en sommes encore au début, et plusieurs questions restent sans réponse, mais ces recherches indiquent que l’exercice physique pourrait intervenir dans la prise en charge du TDAH.

Ces résultats sont cependant à relativiser car les méthodes de recherche sont très variées. Ainsi les critères utilisés pour juger de l’efficacité de la pratique sportive sont très variés (parfois uniquement basées sur le ressenti subjectif des parents d’autre fois sur l’intensité des symptômes de TDAH). Les modalités sportives sont également différentes selon les études (exercice aérobique vs. exercice anaérobique, exercice collectif vs. Individuel, régularité, durée…).

Les questions que les parents nous posent le plus souvent

1.Quel serait le sport le plus adapté pour mon enfant avec TDAH ?

Au-delà des aspects pratiques (organisation, argent, lieux de vie…) il y a plusieurs variables à prendre en compte pour choisir l’activité sportive : ses envies et intérêt, l’âge de l’enfant, sport individuel ou collectif, les objectifs visés…

 

  • S’adapter aux envies de l’enfant

Il est nécessaire, en premier lieu, de prendre en considération les envies de votre enfant, ses goûts et intérêts. Les parents doivent mettre à profit la connaissance qu’ils ont de leur enfant pour s’assurer de choisir un sport dans lequel il pourra s’épanouir et réussir. L’abord ludique est à privilégier.

 

  • L’âge

Quel que soit le sport (et même si débuté précocement), il faut que l’activité respecte les capacités motrices de l’enfant. Le développement moteur se fait par étapes et les attentes ne sont pas les mêmes selon l’âge. Ci-joint quelques repères chronologiques (adapté de Mazeau et Pouhet, 2014).

 

 

  • Sport individuel ou collectif ?

Les parents (et enfants) hésitent souvent entre sport individuel et sport collectif, chacun ayant des points forts et des points faibles différents. Si la réactivité émotionnelle est importante, s’il existe un risque de disqualification/stigmatisation par les pairs, on a tendance à privilégier les sports individuels. Par contre, si l’enfant s’ennuie rapidement, s’il a un profil plutôt sociable, les sports collectifs semblent plus pertinents.

 

 

  • Quels objectifs ?

Enfin, il est pertinent de choisir le sport à partir d’objectifs précis, c’est-à-dire les bénéfices attendus par la pratique de l’activité sportive.

 

 

2. Quelles sont les difficultés que mon enfant peut rencontrer dans la pratique d’un sport ?

La pratique sportive suppose naturellement un apprentissage ; cela nécessite concentration, persévérance, entrainement par répétition, mais également respect des consignes et du cadre. L’impulsivité, le défaut d’attention mais également les difficultés de régulation émotionnelle et la mauvaise tolérance à la frustration vont impacter sur les performances et la réussite et risquent même de décourager certains enfants. Même si l’enfant aime bien le sport qu’il pratique, le vécu de difficultés relationnelles (surtout si collectif trop compétitif) pourrait le décourager et être source de souffrance.

 

3. Mon enfant TDAH a également un trouble développemental de la coordination (TDC). Quel sport serait le plus adéquat pour lui ?

L’apprentissage d’un sport suppose l’apprentissage de gestes (praxies) visant la maitrise de certaines séquences motrices jusqu`à les rendre automatiques. Il s’agit d’actions plus aux moins complexes qui impliquent la coordination motrice

L’association entre TDAH et difficultés de coordination motrice est bien connue. Ainsi même si la pratique du sport peut être rendu plus laborieuse et difficile pour ces enfants, une pratique adaptée d’un sport peut aussi être un excellent outil thérapeutique.

Certains chercheurs suggèrent une amélioration de la motricité fine pour certaines pratiques sportives mixte (c’est à dire la réalisation de plusieurs modalités sportives au même temps. Par ex. faire du football et de la course à pied) . Mais la règle d’or c’est d’adapter le sport aux compétences psychomotrices de l’enfant. Elles sont donc propres à chacun. Il est nécessaire de vous rapprocher des professionnels qui prennent en charge votre enfant (notamment son /sa psychomotricien(ne)) pour vous conseiller et vous orienter.

Néanmoins en cas de retentissement important, certains sports collectifs peuvent entrainer des comparaisons entre les enfants et augmenter l’isolement de l’enfant (ex : le football. Si l’enfant est très maladroit dans le fait de courir avec le ballon au pied, les camarades lui feront moins de passes et il se sentira exclu). Il peut être intéressant de s’entrenir des difficultés de son enfants avec les responsables pour trouver des techniques d’inclusions « sur mesure ».

4. Mon enfant avec TDAH change de sport tout le temps. Que faut-il faire ?

Il est important de connaître les raisons qui le poussent à changer de sport. Vous pouvez lui poser des questions qui vous apporteront peut-être la réponse. Il est utile de savoir si le changement est souhaité en raison de :

# Critiques de la part de l’animateur / professeur/ coach > Aller voir le responsable afin d’obtenir des explications et la version de l’adulte.

# Critiques de la part des autres enfants > Se renseigner sur la nature des critiques : physiques, harcèlement moral, difficultés d’ajustement face aux camarades, critiques face aux performances.

# Niveau de difficulté motrice trop élevé > Comprendre si les compétences motrices, comportementales et cognitives sont adaptées aux exigences de l’activité

# Trop de compétition

# Lassitude face à des séances répétées (toutes les semaines, mêmes horaires, mêmes personnes…)

# L’organisation, le respect des horaires et d’un emploi du temps : soit une difficulté à respecter les règles collectives ; soit trop de consignes à gérer en même temps (ce qui pourrait sous-entendre des difficultés dans la double tâche : faire 2 choses à la fois).

 

Si votre enfant souhaite changer de sport tout le temps, le multisport est une bonne alternative pour les petits. Il permet la découverte et l’initiation à divers sports (collectifs ou/et individuels). Certaines mairies, écoles ou associations peuvent le proposer.

Dans le même esprit, certaines mairies proposent la pratique successive de plusieurs sports (souvent collectifs) au cours d’une année scolaire. Ce fonctionnement permet le renouvellement des activités et la diversité des niveaux de difficulté. Ainsi, si un sport n’est pas apprécié, votre enfant saura qu’il sera pratiqué durant une courte période.

Pour les enfants plus âgés, la volonté de changer de sport peut être difficile à gérer. Il est important d’être à l’écoute de l’enfant et de trouver un compromis. Il peut être intéressant de fixer un contrat avec l’enfant pour essayer de l’engager dans la poursuite de son sport. Si la décision d’arrêt est prise, un temps de réflexion avant la reprise d’un autre sport parait pertinent.

 

5. Mon enfant TDAH, doit-il prendre son traitement médicamenteux pendant l’activité sportive ?

Même des études anciennes montrent des bénéfices du traitement pendant la pratique de sport. La seule molécule commercialisée en France : le Methylphenidate est compatible avec la pratique du sport. Il n’y a donc pas d’indication à arrêter le traitement pendant la pratique du sport. Néanmoins, il faudra être vigilant aux effets secondaires tels que les palpitations cardiaques ou toute autre symptôme qui devront être signalés au médecin prescripteur et faire l’objet d’aménagements du traitement si nécessaire. Par ailleurs, le Methylphenidate est considéré comme un produit dopant lors des compétitions sportives officielles.

 

6. L’encadrant sportif doit-il avoir une formation particulière ?

Une formation spécifique n’est pas nécessaire, mais une sensibilisation au TDAH peut grandement faciliter l’intégration de l’enfant. La qualité de l’encadrant est évidemment primordiale : quel que soit le sport pratiqué, celui-ci doit être bienveillant, valoriser l’enfant dans ses efforts et réalisations, prendre en considération son anxiété.

 

En conclusion, n’oubliez pas que vous êtes le modèle de votre enfant et rien de tel que faire du sport en famille pour que chaque membre trouve sa propre motivation !

 


 

Références scientifiques: 

Lasse Christiansen, Mikkel M. Beck, Niels Bilenberg, Jacob Wienecke, Arne Astrup, and Jesper Lundbye-Jensen :‘Effects of Exercise on Cognitive Performance in Children and Adolescents with ADHD: Potential Mechanisms and Evidence-based Recommendations’. J Clin Med. 2019 Jun; 8(6): 841.

Bar Lambez  , Anna Harwood-Gross , Elana Zion Golumbic , Yuri Rassovsky Non-pharmacological interventions for cognitive difficulties in ADHD: A systematic review and meta-analysis’ J Psychiatr Res. 2020 Jan;120:40-55.

Medicine (Baltimore). 2019 Nov;98(46):e17980. Impact of physical exercise on children with attention deficit hyperactivity disorders: Evidence through a meta-analysis. Zang Y.

Michèle Mazeau et Alain Pouhet (2014): Neuropsychologie et troubles des apprentissages chez l’enfant. Page 130. Éditions Elsevier Masson.

Christina Neudecker , Nadine Mewes  , Anne K Reimers , Alexander Woll   ‘Exercise Interventions in Children and Adolescents With ADHD: A Systematic Review’ J Atten Disord. 2019 Feb;23(4):307-324.

William E Pelham  , Keith McBurnett, Gary W Harper, Richard Milich, Debra A Murphy, Joseph Clinton, Cathy Thiele ‘Methylphenidate and baseball playing in ADHD children: who’s on first?’ J Consult Clin Psychol. 1990 Feb;58(1):130-133.

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