
Votre enfant montre une peur incontrôlable de sortir de chez lui après une période d’enfermement ou d’isolement : c’est ce que nous appelons le syndrome de la cabane. Derrière cette terminologie imagée se cache une véritable souffrance pour votre enfant.
Lorsqu’un enfant passe une période prolongée à la maison, éloigné de ses amis, camarades de classe, et de certaines activités habituelles, il peut s’adapter à ce cadre rassurant et protecteur. Cette nouvelle organisation, bien qu’apaisante sur le moment, peut rendre le retour à l’extérieur plus difficile.
Est-il possible que cette période ait laissé des traces sur le plan psychologique ? OUI, et le syndrome de la cabane en fait partie. Voici quelques informations et stratégies pour prévenir les symptômes.
Le syndrome de la cabane, c’est quoi ?
Le syndrome de la cabane (aussi appelé le syndrome de l’escargot) est le terme utilisé pour faire référence au sentiment de peur à sortir à nouveau de chez soi. Ce syndrome peut survenir après une période d’isolement relativement longue. Ce terme fait référence à la peur de se confronter au monde extérieur, de sortir de son lieu d’enfermement, associée à des conduites d’évitement qui poussent votre enfant à refuser de sortir de chez lui. Votre enfant peut ressentir une appréhension à l’extérieur, à être en contact avec ses camarades ou d’autres personnes en dehors du domicile, de peur de prendre les transports en commun ou de se rendre à l’école.
Le syndrome de la cabane n’est pas en soi un trouble psychiatrique à proprement parler, mais il correspond globalement à un trouble de l’adaptation pour lequel les enfants et adolescents sont particulièrement touchés, en particulier ceux ayant déjà consulté pour un trouble psychiatrique (notamment un trouble anxieux) ou suivis antérieurement pour des difficultés psychologiques.
Pourquoi a t-il peur de sortir ?
- Après une longue période d’isolement, votre enfant a créé un « cocon » dans lequel il s’est senti protégé de toutes les agressions extérieures. Il s’est adapté à vivre dans ce cocon en établissant un nouveau rythme de vie chez lui. Il s’est senti en sécurité chez lui, à l’abri des dangers extérieurs. Dans ce contexte, ressortir de nouveau apparaît comme s’exposer à un danger potentiel.
- Ce sentiment est d’autant plus fort pour bon nombre d’enfants et d’adolescents qui restent à la maison avec les réseaux sociaux comme seule connexion avec l’extérieur. De plus, être à la maison avec ses parents peut procurer un sentiment d’extrême réconfort et de réassurance.
- Parfois s’associe à ce sentiment de peur, un sentiment de colère, d’énervement, de frustration. Cela l’encourage à rester dans sa zone de sécurité.
- Et finalement, la surexposition aux informations peut alimenter aussi sa peur et favoriser son appréhension de sortir. On appelle cela des conduites d’évitement. Ces comportements sont très facilement transmis aux enfants et il est important de faire attention à leurs comportements mais aussi aux nôtres. Les enfants ressentent beaucoup notre anxiété face aux problèmes extérieurs.
Quelles sont les manifestations affectives et anxieuses du syndrome de la cabane ?
Chaque personne est différente et peut exprimer différents symptômes. Ce n’est pas toujours évident de les repérer chez les enfants et les adolescents. Si vous trouvez que votre enfant/adolescent a changé de comportement, alors il est important de l’interroger pour savoir s’il présente ou ressent :
- Des pensées qui le stressent et qui l’empêchent de reprendre ses habitudes en dehors du domicile. Il vous dit avoir très mal au ventre lorsqu’il sort, il semble paniqué avant de sortir et utilise tout un tas de stratégie pour ralentir sa préparation pour sortir (va faire pipi 10 fois). Si vous lui touchez la main, il peut avoir les mains en sueur.
- Apathie et manque de motivation, surtout pour les activités réalisées à l’extérieur.
- De la tristesse, de la colère, de la frustration ou de l’irritabilité. Votre enfant peut paraître plus collant ou semble avoir perdu des acquisitions (comme l’énurésie)
- Des difficultés de sommeil : insomnie d’endormissement, réveils nocturnes, une sensation d’épuisement dans la journée du fait d’un sommeil non réparateur. Votre enfant peut ne plus vouloir dormir seul
- Difficultés pour se concentrer sur les tâches quotidiennes ou scolaires. Votre enfant peut paraître commence absent durant les devoirs.
- Perturbation de l’appétit avec soit augmentation soit une diminution ou encore des grignotages.
Dix stratégies pour prévenir et lutter contre les symptômes du syndrome de la cabane ?
- Prenez votre temps. Il est nécessaire de prendre du temps pour s’adapter à l’extérieur après une période d’isolement. Chaque enfant a son rythme et des besoins différents. Soyez bienveillants à l’égard de votre enfant, soyez patients et avancez à petits pas.
- Exposez-vous de manière progressive. Faites des sorties mais progressivement. Vous pouvez commencer par exposer votre enfant de manière progressive à l’extérieur, aux personnes, aux sons extérieurs. Choisissez des lieux agréables ou des personnes avec qui il aime passer du temps. Commencez par vous promener dans votre rue, puis aller dans une boutique ou faire une balade. Essayez de faire en sorte que la sortie soit la plus agréable possible (se promener dans un parc où il avait ses habitudes, dans des lieux qu’il affectionne particulièrement). Le fait d’associer ce qu’il appréhende avec quelque chose de positif favorise la répétition de celle-ci plus facilement.
- Maintenez une routine et mettez-lui des objectifs à court terme. Il est primordial de faire respecter à votre enfant une bonne hygiène de vie en respectant les horaires de coucher et de lever, des temps de scolaire, des temps de loisirs. Vous pouvez inclure un temps de sortie sur l’emploi du temps de votre enfant (cliquer ici).
- Décidez quand. Choisissez un moment de la journée dans lequel il se sent moins anxieux. Certains enfants préfèrent sortir tôt dans la matinée ou tard dans la journée.
- Partagez vos émotions. La peur est une émotion naturelle, ne vous inquiétez pas pour votre enfant. Essayez de parler avec votre enfant de ses émotions. Partagez-les avec lui, au calme et avec du recul. Vous pouvez aussi en parler en famille avec les autres frères et sœurs. De cette manière, les enfants peuvent eux aussi se sentir autorisés à partager leurs émotions et vous pourrez trouver ensemble des solutions.
- Attention aux ruminations négatives. Évitez d’alimenter les peurs et le sentiment d’insécurité.
- Pratiquez avec votre enfant de la relaxation pour diminuer son stress. Vous pouvez pratiquer avec lui des exercices de respiration, de méditation inspirée de la mindfulness ou de la cohérence cardiaque (cliquer ici).
- Apprenez-lui à gérer sa colère. Durant les sorties, votre enfant peut vous faire remarquer des comportements qui le dérangent, cela peut créer un sentiment de frustration ou de colère, et diminuer son envie de sortir du domicile. Ce ressenti est cohérent, mais il est judicieux d’apprendre à mieux maîtriser sa colère (Cliquer ici). Évitez les lieux les plus fréquentés avec lui – au moins au début – car ensuite, il faudra s’exposer à ces lieux fréquentés.
- Limitez l’exposition de votre enfant aux informations. Nous avons insisté sur le caractère anxiogène d’une surexposition aux médias. Essayez de limiter l’exposition de votre enfant aux chaînes d’informations et réseaux sociaux.
- Apprenez-lui à se sentir en sécurité en dehors de la maison. Il est important de lui expliquer comment se protéger et respecter certaines règles (se laver les mains régulièrement, éviter de toucher son visage, etc.). Cela contribue à renforcer son sentiment de protection et de sécurité, mais sans exagération pour éviter que ces mesures ne deviennent des sources d’angoisse. Aidez-le à comprendre qu’il est possible de se protéger tout en vivant normalement.
Le syndrome de la cabane est donc un trouble de l’adaptation et, dans la très grande majorité des cas, est limité dans le temps et disparaît habituellement après quelques jours/semaines en s’exposant régulièrement et progressivement à ses peurs – et en reprenant progressivement ses habitudes. Par exemple, la reprise de l’école est un bon moyen de retrouver un rythme et ses habitudes d’avant.
Si toutefois les symptômes perdurent ou sont très invalidants, n’hésitez pas à consulter votre médecin généraliste ou le pédiatre de votre enfant pour qu’ils puissent orienter votre enfant dans le réseau de soins à proximité de chez vous.