Si vous observez ou suspectez des difficultés alimentaires chez un élève, cela peut susciter des inquiétudes, que ce soit pour vous ou pour d’autres camarades. Ce document a pour objectif de vous informer sur l’anorexie mentale chez les enfants âgés de 8 à 12 ans. Il vous aidera à mieux identifier et accompagner les enfants concernés, à faciliter le dialogue avec les familles et à répondre aux questions que vous pourriez vous poser.


L’ anorexie mentale, qu’est-ce que c’est ?


L’anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire avec un retentissement sur la santé pouvant être majeur. Les enfants souffrant d’anorexie mentale présentent :

  1. Des difficultés à maintenir un poids suffisant pour leur âge et leur taille car ils mettent en place des comportements visant à maigrir ou à ne pas prendre de poids (manger moins, éviter certains aliments, se dépenser de façon excessive…)
  2. Une peur intense de grossir, qui vient occuper toute la place dans leurs pensées
  3. Une perturbation de leur image corporelle : ils peuvent se voir très gros alors qu’ils ne le sont pas, porter une attention exagérée à certaines parties de leur corps (par ex : le ventre, les cuisses)
  • C’est un trouble qui peut toucher les filles ET les garçons dès l’âge de l’école élémentaire, et ce, quel que soit le milieu dans lequel ils évoluent.
  • Ces troubles présentent un risque majeur de retentissement sur la croissance, la puberté ou le développement du cerveau des enfants. Il est nécessaire de les repérer rapidement afin d’alerter la famille qui consultera des professionnels de santé pour une prise en charge adaptée.
  • Le repérage précoce permet de limiter les impacts physiques et psychologiques sur le fonctionnement des enfants. Pour en savoir plus sur le repérage de l’anorexie mentale de l’enfant, cliquez ici.

Les difficultés qui peuvent s’ajouter à l’anorexie mentale chez l’enfant


  • Certains traits de tempérament ou pathologies sont fréquemment associés à l’anorexie de l’enfant. On retrouve aussi des difficultés dites secondaires à la dénutrition : le corps fonctionne en mode « économie d’énergie », avec par exemple un impact sur la concentration ou la régulation des émotions.

 


Personnes et ressources pouvant vous aider


Les parents doivent bien sûr être alertés et orientés vers un professionnel médical (médecin généraliste ou pédiatre puis pédopsychiatre) qui pourra poser le diagnostic et mettre en place des soins adaptés pluridisciplinaires. Mais il existe aussi des personnes ou des ressources vers lesquelles vous pouvez vous tourner afin de mieux comprendre et accompagner dans sa scolarité un élève présentant une anorexie mentale.

  • A l’école/au collège : médecin scolaire, infirmière scolaire, psychologue scolaire, enseignant référent de la MDPH (pour les élèves avec un PPS)

La maladie et l’école


Un enfant de ma classe est hospitalisé, que puis-je faire en son absence ?

Dans certaines situations, une hospitalisation longue est nécessaire pour permettre la reprise de poids et prendre en charge des complications médicales.

1/ Communiquer :

    • Il n’est pas facile pour un enfant ou une famille de confier des difficultés médicales. Echangez avec la famille et décidez ensemble des informations à partager avec la classe et avec les autres adultes de l’établissement pour accompagner au mieux leur enfant. Il n’est pas nécessaire de préciser le diagnostic médical de l’enfant aux autres élèves, même si ses parents vous l’ont transmis. Cela relève de la vie privée de l’enfant et de sa famille. Il est cependant souhaitable d’informer vos élèves de l’hospitalisation de leur camarade afin qu’ils ne restent pas sans réponse face à l’absence de cet enfant. Si des élèves de la classe ont des doutes, des craintes vis à vis de la maladie de leur camarade, il est préférable qu’ils en parlent avec vous ou un adulte de l’établissement plutôt que de de les laisser véhiculer entre eux des idées erronées ou anxiogènes et de nourrir des rumeurs (ex : ” il est tout maigre parce qu’il a un cancer et qu’il va mourir…”).
    • L’information donnée aux élèves sera donc choisie et adaptée à leur âge. Donnez une information claire et rassurante : « XX a des problèmes de santé. Il va être soigné par des professionnels de santé pour l’aider à aller mieux, il sera absent pendant quelques temps. »

    2/ Maintenir le lien :

    Il est possible que certains enfants demandent à en savoir davantage. Insistez sur le caractère privé de ces informations. Ecoutez leurs inquiétudes, et proposez, pour ceux qui le souhaitent d’adresser des courriers ou des messages de soutien par l’intermédiaire de la famille. Cela permettra à l’enfant hospitalisé de maintenir certaines relations sociales et de se sentir accompagné par ses camarades sur le chemin de la guérison. Souvent, certains enfants ne savent pas quoi écrire : vous pouvez les guider en les encourageant par exemple, à simplement raconter ce qu’ils font en classe, leurs loisirs et en insistant sur l’essentiel : même un tout petit mot d’encouragement, une petite pensée peuvent faire chaud au cœur.

    3/ Les apprentissages :

    Certains hôpitaux disposent d’un centre scolaire. Les enseignants de l’école de l’hôpital (en particulier l’enseignant coordonnateur) peuvent faire le lien avec l’enseignant de l’établissement scolaire habituel de l’enfant si la famille le souhaite. L’objectif d’une scolarité partielle pendant une hospitalisation (quelques heures par semaine) n’est pas la performance académique. L’idée est avant tout de garder un lien avec la “vie normale” et donc avec l’école, et de rassurer l’enfant sur ses compétences scolaires.


    Un enfant de ma classe va revenir à l’école après une absence prolongée pour hospitalisation, comment s’y préparer ?

    1/ Avec les parents de l’enfant :

    • La prise en charge de l’anorexie mentale est longue, l’élève peut avoir été absent plusieurs semaines ou mois, il est nécessaire de préparer le retour en classe en rencontrant les parents en amont afin de discuter des besoins de l’enfant. La reprise de l’école se fait souvent progressivement en commençant par une reprise de contact de quelques heures en fin d’hospitalisation.

    2/ Préparer les élèves de sa classe :

    • L’enfant hospitalisé n’a peut-être pas envie de répondre à des questions sur ses soins. Ses camarades doivent être prévenus de son retour afin de l’intégrer au mieux dans le groupe classe, sans le mettre en difficultés. Il convient d’éviter les questions sur sa maladie, d’éviter les remarques sur son apparence physique ou sur ce qu’il mange. Il y a pleins d’autres sujets de conversation !

    Ça y est, mon élève est de retour en classe. Y-a-t-il des choses à faire ? A ne pas faire ?

    Ce n’est pas évident d’être confronté à la maladie d’un de ses élèves ou d’un de ses camarades, et pour l’enfant malade, guérir de l’anorexie prend du temps et le chemin vers la guérison peut être ponctué d’obstacles.

    1/ Favoriser l’intégration :

    • Comment témoigner notre soutien à notre élève et éviter les maladresses ? Bien sûr, il faut éviter les commentaires sur l’apparence de l’enfant, même sous forme de compliments : l’enfant peut ressentir une grande ambivalence sur sa reprise de poids. En revanche, il est possible de dire à l’enfant combien on est content de le revoir, combien il a une place dans cette classe. Par d’infimes actions vous pouvez faire prendre conscience à l’enfant de sa valeur et renforcer son estime de lui-même : encouragez-le, félicitez-le.
    • Veillez à ce que ses amis l’accueillent et l’intègrent dans ce qui fait la vie d’un enfant de son âge : les jeux, les travaux en petits groupe, les discussions, les projets, les rires !

    2/ Indulgence lors des évaluations :

    Une bienveillance est nécessaire lors de la reprise des cours, même des élèves auparavant très performants peuvent présenter des difficultés à se concentrer, se fatiguer rapidement en classe ou être stressés d’avoir manqué des cours du fait de leur longue hospitalisation. Veillez à adapter les évaluations et/ou la notation aux connaissances de l’enfant afin de le placer en situation de réussite et de faciliter son retour en classe. Parfois, le médecin de l’enfant sollicitera transitoirement une dispense de notation.

    3/ Les cours d’Education Physique et Sportive :

    • Les cours d’EPS sont généralement contre-indiqués pour une période de 1 à plusieurs mois. L’enfant peut présenter des fragilités qui le rendent plus fatigable ou parfois vulnérable au risque de fracture lors d’activités physiques. Le sport représente aussi une importante source de dépense d’énergie qu’il est parfois nécessaire de limiter pour faciliter la reprise de poids. Pourtant certains enfants vont chercher à majorer leurs activités physiques dans le but de maigrir, il est donc nécessaire de rester vigilant lors des cours d’EPS mais aussi en récréation.
    • La reprise progressive du sport peut impliquer la collaboration de l’enseignant en étant conditionnée à la prise d’une collation alimentaire qui vient compenser les dépenses d’énergie du cours de sport.
    • Lors des cours d’EPS, il est important d’éviter les comparaisons entre élèves sur le poids ou la taille et de veiller à inclure l’ensemble des élèves dans les activités.

    4/ Les collations :

    Les prescriptions de collations sont aussi fréquemment réalisées, sous la forme de biscuits ou jus de fruit mais aussi sous la forme de boissons énergétiques (les compléments nutritionnels oraux) sur prescription médicale. Là encore l’enfant peut faire l’objet de questions de la part de ses camarades, il est nécessaire d’être vigilant à ce qu’il ne soit pas exclu ou stigmatisé.

    5/ La cantine :

    Les repas à la cantine représentent souvent une source importante de stress (menu non anticipé à l’avance, choix des aliments limité ou absent, quantités standards servies par le personnel de la cantine, crainte du regard et jugement des autres enfants…). Le retour à la cantine est préparé avec l’enfant et ses parents par les soignants qui les accompagnent. La mise en place de panier repas préparés par la famille peut permettre de rassurer l’enfant en lui assurant des repas adaptés à ce qu’il est capable de manger. Cela permet souvent une reprise progressive de la fréquentation de la restauration scolaire. L’enfant doit pouvoir manger avec ses camarades de classe dans un temps raisonnable (40 min maximum) et ne pas passer toute la durée de la pause méridienne assis devant son assiette.

    6/ Les soins sur le temps scolaire :

    Par ailleurs, des aménagements de la scolarité de l’élève sont parfois nécessaires pour se rendre en soin (consultations médicales, psychologiques, hôpital de jour…). Même lorsque l’enfant semble aller mieux, ces prises en charge restent nécessaires afin de continuer à combattre la maladie et de prévenir les rechutes. Ces absences occasionnelles ne doivent pas être stigmatisantes pour l’enfant ou sources des moqueries, de remarques blessantes de la part de ses camarades de classe (“Il/elle est absent alors qu’il/elle n’a pas l’air malade…”)

    7/ Les traitements et les urgences :

    • Parfois un traitement médicamenteux contre le stress peut être prescrit à l’enfant en prise quotidienne ou si besoin lors de majoration de son anxiété, cela fera l’objet d’une prescription spécifique et d’un PAI.
    • En cas d’urgence, malaise, perte de connaissance, il est évidemment nécessaire d’appeler les services de secours.
    • Certains de ces aménagements de la scolarité font l’objet de demandes spécifiques par le médecin chargé de l’enfant, en collaboration avec le médecin scolaire dans le cadre de PAI, de PAP ou de PPS. Le SAPAD est parfois sollicité. Vous pouvez consulter un exemple de document pouvant être réalisé avec l’enfant, son enseignant et ses parents afin de constituer une sorte de « trousse de secours » pour les moments difficiles :

    Abréviations :

    • PAI : Projet d’Accueil Individualisé
    • PAP : Plan d’Accompagnement Personnalisé
    • PPS : Projet Personnalisé de Scolarisation
    • SAPAD : Service d’assistance pédagogique à domicile

      Références

      Auteurs

      Anaël AYROLLES
      Psychiatre

      Hélène PONCET-KALIFA
      Psychologue

      Coline STORDEUR
      Psychiatre

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