Suis-je en train de faire une Dépression du Post-Partum ?

Rédigé par Dr Mélanie Hannart, Dr Sarah Iribarnegaray

Je viens d’accoucher, mon bébé est en bonne santé et pourtant je me sens triste 

Rédigée par : Dr Mélanie Hannart, Dr Sarah Iribarnegaray.


 

Après avoir traversé toutes les étapes de la grossesse et de l’accouchement, vous abordez une toute nouvelle phase de la maternité: le post-partum. Durant cette période, plusieurs sentiments peuvent coexister, entre la joie d’accueillir ce nouveau membre de la famille, les moments de tristesse et de fatigue et parfois le découragement. Environ une femme sur 5  a un épisode dépressif au décours de l’accouchement.

Pour prévenir ces difficultés, diverses ressources et outils sont à votre disposition durant la période post-partum. Si vous ressentez des symptômes de dépression, des solutions adaptées existent pour vous aider.

Voici quelques outils pour Comprendre, Détecter, Prévenir, Dépister et Soigner la dépression du post-partum.


1- COMPRENDRE – La période périnatale: une période de forte vulnérabilité

 

La période périnatale est le moment qui entoure la grossesse, l’accouchement et jusqu’au 1 an de votre enfant. C’est une période riche en bouleversements, ce qui en fait une période de vulnérabilité sur le plan psychique. Cette période est caractérisée par des : 

  1. Des modifications physiques : Sous l’influence de facteurs hormonaux, le corps de la femme va évoluer et se modifier de manière physiologique tout au long de la grossesse, de l’accouchement puis du post-partum. 
  2. Des bouleversements émotionnels : La période périnatale est également marquée par un vécu émotionnel intense. Les futures mères peuvent éprouver un large éventail d’émotions, allant de l’immense joie à l’anxiété voire la tristesse. Les modifications hormonales et les ajustements psychologiques liés à la parentalité peuvent influencer l’état émotionnel pendant cette période.
  3. Des préoccupations liées à la santé du bébé : Le suivi de la grossesse tout comme le début de vie de l’enfant sont médicalisés avec des rendez-vous médicaux réguliers, des échographies, différents tests… Les parents, soucieux de l’état de santé et du bien-être de leur bébé investissent ce suivi médical qui peut parfois être anxiogène.
  4. La transition vers le rôle de parent : La période périnatale marque une transition importante dans la vie d’une femme, d’un couple et d’une famille, passant du statut de futurs parents à celui de parents réels. Il peut y avoir des ajustements à faire pour répondre aux besoins du bébé, organiser les soins, gérer les responsabilités parentales et s’adapter à un nouvel équilibre familial.

La période périnatale  est  donc associée à un risque accru d’anxiété et de dépression, notamment dans le post partum. Il est donc crucial de surveiller attentivement la santé mentale des parents pendant cette période et de rechercher un soutien approprié si nécessaire.


 

2-   DÉTECTER – le baby-blues et la dépression du post-partum :  comment les différencier ? 

 

  • La grossesse est un moment où votre santé est régulièrement évaluée. Entre les rendez-vous obstétricaux, les échographies ou lors des cours de préparation à la naissance, vous avez rencontré toute une série de soignants attentifs. A l’inverse, après votre accouchement, vous avez pu avoir l’impression que c’était à présent votre bébé qui occupait le devant de la scène auprès des professionnels de santé.  

 

  • Pourtant le post-partum est l’un des moments dans la vie d’une femme où la vulnérabilité psychique est la plus grande:  De nombreuses femmes peuvent présenter des symptômes de souffrance psychique de nature et d’intensité variable, comme de l’irritabilité ou de la tristesse. Ces symptômes ne sont pas forcément graves et ils peuvent être passagers mais aussi s’installer dans le temps et avoir un retentissement. Il est donc important de rester vigilants durant cette période afin de pouvoir différencier un baby blues qui concerne entre 50 et 70% des femmes et qui est passager, d’une dépression du post-partum qui concerne 20% des femmes et qui doit être prise en charge.

 

  • À noter que les femmes en post partum ne sont pas les seules concernées, les conjoint.e.s peuvent également présenter des symptômes dépressifs dans les mois qui suivent la naissance de leur bébé. 


Comment différencier le baby blues passager de la dépression du post-partum? 4 repères

 

  • La durée des symptômes : Le baby blues est transitoire, il survient dans les premiers jours et dure de quelques heures à quelques jours. En moins d’une semaine, les émotions s’apaisent et l’on retrouve son état habituel. Si les symptômes s’installent (durée supérieure à 1 semaine), il est important de se rapprocher d’un professionnel de santé (sage-femme, médecin généraliste, PMI, psychologue ou psychiatre) pour bénéficier d’une aide adaptée.

 

  • La période d’apparition des symptômes : L’épisode dépressif du post partum  intervient le plus souvent entre le 3e et le 6e mois après la naissance (vers la période de reprise du travail par exemple). La dépression du post-partum persiste au-delà de deux semaines et peut durer des mois si elle n’est pas traitée.

 

  • L’intensité des symptômes : Les symptômes du baby blues sont généralement peu intenses. Il s’agit le plus souvent d’une fluctuation de l’humeur, pleurs sans raison évidente voire crise de larmes, d’une irritabilité, de troubles du sommeil, et la crainte de ne pas être capable de s’occuper de son bébé. La dépression du post-partum associe elle aussi plusieurs symptômes, présents tous les jours, pendant au moins 2 semaines et intenses,  dont les plus fréquents sont: sentiment de tristesse sans raison apparente, perte d’envie ou de plaisir, des difficultés de sommeil,  des difficultés de concentration,  des modification de l’appétit (augmentation ou diminution), un sentiment de culpabilité, de dévalorisation comme l’impression d’être une mauvaise mère, une inquiétude excessive pour son bébé ou difficulté à s’en occuper, et parfois Idées noires voire suicidaires.

 

  • Le retentissement sur le fonctionnement : Le baby blues, de par son aspect passager et ses symptômes peu intenses a peu de retentissement sur le fonctionnement de la maman. En revanche, celui de la dépression du post-partum est notable sur la vie de la maman, avec des difficultés à s’occuper de son bébé et d’elle-même, et des tâches du quotidien. La maman peut aussi se détourner des activités qui lui plaisent habituellement. 

En résumé, si le baby-blues est un épisode bref, banal et sans gravité, attention à son intensité et à sa durée. Dans certains cas, une véritable dépression du post-partum peut s’installer. Ne minimisez pas votre vécu et surtout ne culpabilisez pas !  La maternité est souvent « idéalisée » par l’entourage, et les soins apportés aux jeunes mères déprimées sont encore insuffisants. 


 

3- PRÉVENIR – de la survenue d’un épisode dépressif du post-partum 

 

  • A quel moment ? Faire des consultations pré/post-natales et des séances de préparation à l’accouchement des temps pour parler de vos préoccupations. La grossesse est un moment propice pour vous informer, prendre soin de vous et préparer l’arrivée de votre enfant. De nombreuses ressources sont disponibles à proximité de votre domicile (PMI, réseaux de santé en périnatalité, associations) ou sur internet (site de la CPAM, de la CAF, des 1000 premiers jours). En complément de votre suivi médical de grossesse, plusieurs temps de consultation dédiés à l’évaluation de votre situation et de vos besoins, vous sont proposés.

 

  • L’entretien prénatal précoce peut avoir lieu quel que soit le terme de la grossesse, dès le 4e mois. Il est réalisé par votre sage-femme ou votre médecin qui peut vous recevoir seule ou avec votre conjoint.e. Cette consultation est un temps d’échange et d’écoute pour faire le point sur votre projet de naissance et de parentalité. Vous pouvez exprimer vos attentes, vos questions, vos difficultés éventuelles (médicales, sociales, psychologiques) et vos besoins en termes d’accompagnement pendant votre grossesse et après l’accouchement. Une grossesse non prévue, l’inquiétude de devenir mère, des difficultés de couple, la découverte d’une malformation fœtale, des difficultés financières, les difficultés d’être loin de ses proches pendant la grossesse et l’inquiétude de se retrouver isolée après l’accouchement, un antécédent de dépression… sont autant de raisons de se sentir vulnérable et d’avoir besoin d’une aide appropriée.

 

  • Les séances de préparation à la naissance et à la parentalité réalisées en fin de grossesse par votre sage-femme ou votre médecin sont aussi l’occasion de vous informer et de construire votre projet parental. S’interroger en amont permet d’anticiper au mieux, de s’outiller et de vous sentir soutenue dans la construction de vos compétences maternelles à venir.

 

  • Un entretien post-natal précoce entre la 4e et la 8e semaine qui suit votre accouchement réalisé par votre sage-femme ou votre médecin peut vous être  également proposé. Il permet de voir avec vous comment se passe l’arrivée de votre bébé et de repérer de manière précoce d’éventuelles difficultés ou symptômes  dépressifs afin de vous proposer une aide adaptée.

Comment faire ? 10 outils faciles à utiliser 

 

  1. Priorisez le repos : Accordez-vous des moments de repos et de récupération autant que possible.Reposez vous avant l’arrivée du bébé (pas toujours simple si vous avez déjà des enfants). Pendant le post partum, dormez dès que votre bébé dort, même le jour, même peu de temps. Le sommeil joue un rôle essentiel dans votre bien-être émotionnel.
  2. Sollicitez un soutien émotionnel : Entourez-vous de personnes bienveillantes et compréhensives qui vous soutiennent émotionnellement. N’hésitez pas à parler ouvertement de vos besoins, vos émotions et de vos préoccupations.
  3. Partagez les responsabilités : Impliquez votre entourage proche (partenaire, famille, ami.e.s), demandez-leur de l’aide durant la grossesse et du relais pour les soins du bébé, les tâches ménagères et la gestion du quotidien après l’accouchement. Cela permet d’éviter de s’épuiser. Déléguez au maximum les tâches de la maison pour consacrer votre énergie à votre grossesse puis à votre bébé à sa naissance. 
  4. Prenez soin de votre alimentation : Optez pour une alimentation saine et équilibrée pour favoriser une bonne récupération :

     


  5. Pratiquez une activité physique régulière : L’activité physique douce est bénéfique pour l’état de santé global et entre autres l’état de santé mental.  Elle peut contribuer à se réapproprier son corps et peut aussi aider à améliorer le sommeil et diminuer l’anxiété. N’hésitez pas à consulter votre professionnel de santé pour connaître les exercices adaptés durant la grossesse et durant le post-partum (marche, nage, yoga doux…).
  6. Pratiquez la relaxation : Explorez des techniques de relaxation comme la méditation, le yoga, la cohérence cardiaque, la sophrologie… Ces pratiques peuvent aider à diminuer le stress et favorisent  une meilleure gestion de ses émotions.
  7. Établissez une routine : Mettre en place une routine quotidienne pour vous et puis avec votre bébé à sa naissance, peut vous apporter un sentiment de stabilité, ce qui participe à votre bien-être psychique.
  8. Prenez du temps, même minime, pour vous-même : Accordez-vous des moments de plaisir, simples et accessibles. Faites des activités qui vous plaisent et qui vous permettent de vous ressourcer, que ce soit la lecture, écouter de la musique, cuisiner, marcher au soleil ou tout autre passe-temps qui vous fait du bien.
  9. Restez connectée avec les autres mamans : Rejoignez des groupes de soutien ou participez à des activités pour les jeunes mères enceintes ou maman-bébé. Le partage d’expériences avec d’autres mamans permet de se sentir moins isolée et peut être réconfortant et bénéfique.
  10. Soyez bienveillante envers vous-même : Soyez patiente et indulgente envers vous-même, car la période de la grossesse et plus encore du post-partum est une période de transition et d’adaptation. Devenir parent est un apprentissage et un long processus. Acceptez que tout ne soit pas parfait, notamment concernant l’allaitement !

 

4- DEPISTER et SOIGNER  – Je pense faire une dépression du post-partum, que dois-je faire ? 

 

# Outils de dépistage : Il est possible d’utiliser des échelles de dépistage, telles que l’échelle d’Edinburgh – également connue sous le nom d’EPDS. Cette échelle est un auto-questionnaire composé de 10 items, chacun noté de 0 à 3. Le score final est la somme des dix notations : un score plus élevé indique un risque plus important de dépression, et une dépression potentiellement plus sévère.

Un score inférieur ou égal à 10 indique une faible probabilité de dépression. Mais si vous avez des doutes, n’hésitez pas à en parler à votre entourage ou un professionnel de santé. Vous pouvez aussi de nouveau remplir le questionnaire dans les jours ou semaines qui suivent pour surveiller l’évolution de vos symptômes. 

Un score supérieur à 10 indique une probabilité élevée de dépression. Il faut vous tourner vers un professionnel de santé pour une évaluation plus approfondie. 

Il est essentiel de souligner que l’échelle d’Edinburgh est un outil de dépistage et ne peut, en aucun cas, poser un diagnostic. Pour obtenir une évaluation précise de votre situation, il est recommandé de consulter un professionnel de santé qui pourra interpréter les résultats et vous apporter un soutien adapté.

# Parlez à un professionnel de santé que vous connaissez de vos difficultés (médecin traitant, gynécologue-obstétricien, psychiatre, sage-femme, psychologue ou professionnel de la PMI). Il saura vous orienter ou vous prodiguer les soins nécessaires. 

# Initiez un suivi avec un professionnel de santé mentale. Il pourra vous aider à trouver les personnes ressources si besoin, initier le traitement qui est adapté pour vos besoins. Parfois un traitement médicamenteux peut être nécessaire. Discutez-en avec ce professionnel de santé. Faites lui confiance et ne culpabilisez pas.. 

# Partagez vos difficultés avec d’autres mamans/parents. Il existe aussi des Lieux d’Accueil Enfant Parent (LAEP) qui sont des espaces d’accueil de jeunes enfants (<6 ans) accompagnés d’au moins un adulte référent. Ils constituent un espace de jeu libre pour les enfants et un lieu de parole pour les parents. Certaines associations peuvent elles aussi être d’un grand soutien comme “Maman blues”, “Jumeaux et plus”, “AGPL”. 

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