Modifications du comportement alimentaire : que faire ?

Votre enfant mange moins qu’avant ? Refuse des aliments qu’il acceptait auparavant ? Évite les morceaux ou ne veut plus goûter de nouvelles choses ?
Ces changements dans le comportement alimentaire peuvent avoir des causes très différentes et parfois multiples : tristesse, peur de grossir, anxiété, peur de vomir, sélectivité ancienne, manque d’intérêt pour la nourriture… Ils ne renvoient pas tous à un trouble, mais méritent d’être pris au sérieux quand ils durent, s’accompagnent d’un mal-être, ou ont un impact sur la croissance.

Cette fiche vous propose des repères pour mieux comprendre ce qui peut se jouer derrière une perte d’appétit ou un refus alimentaire chez l’enfant et l’adolescent (hors nourrissons).
Elle ne remplace pas une consultation médicale, mais vous aidera à savoir à quoi être attentif, et comment réagir en première intention.


TRISTESSE – Mon enfant a une baisse d’appétit et il est triste ou s’isole


Quand un enfant ou un adolescent mange moins et que cela s’accompagne d’un changement d’humeur – retrait, perte d’entrain, irritabilité ou tristesse – il est important d’être attentif. Ces signes peuvent évoquer un état dépressif (voir notre fiche sur la dépression).

Dans ce contexte, la baisse d’appétit n’est pas le seul signal, mais elle fait partie d’un ensemble. Et chez un enfant, ne pas prendre de poids équivaut à une perte de poids chez un adulte. Un enfant en bonne santé prend régulièrement du poids et grandit. Si vous observez une stagnation ou une perte progressive de poids, il est nécessaire de consulter le médecin traitant.

En attendant de pouvoir rencontrer un·e pédopsychiatre ou un·e psychologue, vous pouvez d’ores et déjà soutenir votre enfant au quotidien. La priorité n’est pas de le forcer à manger, mais de stimuler en douceur son appétit en lui proposant ses plats préférés, dans un climat apaisé.

Que faire quand la tristesse coupe l’appétit ?

Quand un enfant ou un adolescent mange moins parce qu’il est triste, le but n’est pas de le forcer à manger, mais de réinscrire l’alimentation dans le lien et le plaisir.

# Proposez-lui des repas simples, rassurants, qu’il aime vraiment, sans trop parler de quantité. Évitez les remarques sur ce qu’il mange ou ne mange pas. Mieux vaut une ambiance chaleureuse qu’un plat terminé.

# Ne le laissez pas s’isoler à chaque repas. Sans insister, proposez-lui de manger ensemble, même brièvement, même un goûter. Ce sont des moments de lien, de partage, pas seulement de nutrition.

# Impliquez-le doucement dans les repas : mettre la table, choisir un dessert, cuisiner une recette familiale. Ce sont des façons indirectes de recréer du lien avec l’alimentation.

# Essayez d’intégrer au quotidien des temps d’activité partagée non alimentaires : jeux de société, courte balade, bricolage… Le simple fait de « faire quelque chose ensemble » peut amorcer un mouvement vers l’extérieur.

# Gardez en tête que si la tristesse est profonde, l’appétit reviendra rarement sans aide extérieure. Mais ces petits gestes au quotidien peuvent limiter le repli, revaloriser l’enfant, et faciliter l’entrée dans un soin psychologique et pédopsychiatrique.


ANOREXIE – Mon enfant a une baisse d’appétit et il a peur de prendre du poids ou se trouve trop gros


Certains enfants restreignent leur alimentation parce qu’ils ont peur de grossir ou se trouvent “trop gros”. Cette peur peut être intense, persistante, et les pensées qui l’accompagnent sont rarement exprimées clairement. Même un jeune enfant peut vivre ce type de préoccupation.

Ces signes doivent faire penser à une anorexie mentale, un trouble qui peut commencer tôt, parfois dès l’école élémentaire. On observe souvent une modification progressive de l’alimentation (suppression des aliments gras, sucrés, arrêt des goûters…) et une tendance à bouger davantage, parfois de manière excessive.

Un autre signe d’alerte : la stagnation ou la perte de poids, même minime. Chez un enfant, ne pas grandir ou ne pas prendre de poids est déjà un indicateur préoccupant. Il est donc important de consulter rapidement son médecin traitant.

Que faire quand votre enfant a peur de grossir ?

Quand un enfant a peur de grossir, le réflexe de restriction s’installe vite. Manger devient source de de stress intense. Ce que vous pouvez faire : réduire la pression, restaurer un climat de sécurité alimentaire, et l’aider à garder contact avec son corps autrement que par le poids.

# Ne commentez pas son poids, sa silhouette ou son assiette, même positivement. Ces remarques entretiennent malgré vous la focalisation sur le corps et sur la nourriture.

# Faites de l’heure du repas un moment prévisible, sans enjeux. Ne forcez pas, ne négociez pas. Servez des portions normales, proposez une ambiance calme, conviviale, sans tension.

# Évitez les discours sur “le besoin de manger plus”, qui risquent d’accentuer la résistance. Mieux vaut parler de santé, d’énergie, de projets partagés.

# Encouragez les activités qui reconnectent positivement au corps sans l’évaluer : peinture, chant, promenade, yoga… Il ne s’agit pas de faire du sport ni de rechercher la performance, mais de redonner du plaisir à bouger ou à ressentir et de mettre en oeuvre des stratégies d’auto-apaisement.

 # Impliquez-le dans des tâches simples : éplucher une pomme, choisir un plat. Cela redonne une forme de maîtrise sans entretenir le contrôle.

# Si la peur de grossir prend toute la place, dites-lui que vous comprenez sa souffrance. Consulter ensemble pour obtenir de l’aide.

# Gardez à l’esprit que dans ce type de trouble, une intervention précoce fait toute la différence. Même si la situation ne paraît pas “si grave”, il est essentiel d’agir tôt pour éviter l’aggravation.

Lien vers les fiches anorexie.


SÉLECTIVITÉ – Mon enfant n’a pas de baisse d’appétit MAIS il mange peu depuis longtemps, mange presque toujours la même chose et refuse les aliments nouveaux


Certains enfants mangent en petite quantité ou ont une alimentation très peu variée : quelques aliments seulement, toujours les mêmes, et un rejet marqué de toute nouveauté. Cela peut être présent depuis la petite enfance, ou apparaître plus tard, puis s’installer dans le temps.

Il ne s’agit pas d’un caprice surtout quand cela impacte le quotidien, génère des conflits ou crée des carences nutritionnelles. Parfois, ces troubles alimentaires sélectifs et ou restrictifs relèvent d’un trouble appelé ARFID : trouble de l’évitement/restriction de l’ingestion des aliments. Ce trouble se manifeste par une restriction alimentaire marquée, sans volonté de perdre du poids ni préoccupations liées à l’image corporelle. L’enfant peut éviter certains aliments en raison de leur apparence, texture, goût, odeur, ou par peur de s’étouffer, de vomir ou de se sentir mal. Cela entraîne des difficultés à s’alimenter normalement, avec un retentissement sur la croissance, la santé ou la vie sociale.

Chez un enfant, stagner en poids ou ne plus grandir est un signal d’alerte. En cas de doute, il est recommandé de consulter le médecin traitant pour vérifier l’impact sur la croissance.

Lien vers les fiches ARFID.

Que faire quand votre enfant mange peu et refuse les aliments nouveaux ?

# Commencez par sécuriser la relation à l’alimentation. Évitez les pressions à table, les chantages ou le forçage”. Cela augmente souvent l’anxiété et renforce la rigidité alimentaire.

# Proposez un aliment nouveau en petite quantité, sans le mélanger à d’autres, en le mettant simplement à disposition à table. L’objectif n’est pas qu’il le mange tout de suite, mais qu’il s’y habitue visuellement, olfactivement, progressivement.

# Valorisez toute tentative d’approche : sentir, toucher, goûter du bout des lèvres. Félicitez l’effort même s’il vous semble modeste..

# Gardez des repères réguliers de repas, même si les quantités sont faibles. La régularité aide à anticiper et les routines rassurent..

# Si votre enfant mange peu et a faim entre les repas, proposez-lui des petites collations.

# Impliquez votre enfant dans, le choix des recettes, les courses, la préparation des repas. Cela permet de se familiariser avec des aliments en dehors du moment du repas.

# Si votre enfant a des troubles du neurodéveloppement (TSA, TDAH…) ou une hypersensibilité sensorielle, ses difficultés alimentaires peuvent être plus marquées. Dans ce cas, un accompagnement spécialisé peut aider à réduire la sélectivité et à augmenter les apports nutritionnels, sans forcer.

# Enfin, gardez à l’esprit que la patience est la clé. La diversification peut se faire sur des mois, parfois des années. L’important est de soutenir sans brusquer, et de faire appel à des professionnels si la croissance, la santé ou la vie quotidienne sont affectées.

Mon enfant est âgé entre 2 et 3 ans, ne souhaite pas goûter de nouveaux aliments et ne veut plus manger de légumes verts alors qu’avant, il mangeait de tout. Si votre enfant est en bonne santé et grandit bien, il s’agit d’une phase normale dans son développement alimentaire. Elle est liée à la peur de la nouveauté (appelée néophobie) et est transitoire. Elle ne nécessite pas de prise en charge médicale. Proposez régulièrement et de manière ludique, en variant les présentations, les aliments boudés par l’enfant et montrez lui l’exemple en continuant à manger varié. Assurez-lui des apports nutritionnels suffisants pour son âge en composant des menus équilibrés, avec ses goûts alimentaires. Votre enfant reprendra une alimentation plus variée et acceptera de goûter des aliments nouveaux vers 3-4 ans. Si ce n’était pas le cas, vous ferez le point avec son médecin traitant à ce moment-là.

ANXIÉTÉ / Mon enfant n’a pas de baisse d’appétit MAIS il refuse de manger des morceaux parce qu’il a peur de s’étouffer ou de vomir


Certains enfants développent une peur de vomir que l’on appelle émétophobie. Cette peur peut apparaître après un épisode de gastro-entérite ou un souvenir désagréable lié aux vomissements. Dans d’autres cas, c’est la peur de s’étouffer — phagophobie — qui se manifeste, souvent après une fausse route ou un épisode de douleur en mangeant.

Ces réactions peuvent être transitoires : elles durent alors un à trois jours, et disparaissent avec la reprise d’une alimentation normale. Mais si votre enfant continue de refuser certains aliments, évite systématiquement les morceaux ou ne tolère plus que des textures très lisses, il est important d’agir.

Que faire ?

Si vous reconnaissez votre enfant dans cette situation, le premier réflexe est de ne pas forcer. La contrainte accentue souvent l’anxiété et peut aggraver les blocages. 

# À la place, proposez une alimentation adaptée, en accord avec ce qu’il tolère (purées, compotes, textures lisses…), tout en gardant des repères de repas réguliers.

# Valorisez chaque petite progression : un morceau approché, touché, goûté. Même sans ingestion, cela prépare la suite.

# Proposez à votre enfant de participer à la préparation des repas pour qu’il retrouve un sentiment de contrôle. Parfois, le simple fait de manipuler les aliments (les couper, les cuisiner, les sentir) aide à se réhabituer en douceur.

# Nommez les peurs si votre enfant en parle : « Tu as peur de t’étouffer ? », « Tu as eu mal la dernière fois ? ». Cela aide à faire baisser la tension et à légitimer son ressenti sans l’amplifier.

# Enfin, si la situation persiste, parlez-en à votre médecin traitant ou à un professionnel de santé mentale. Une guidance parentale ou un accompagnement psychologique bref peut suffire à débloquer la situation si le trouble ne s’est pas installé dans la durée.

Nous vous recommandons de lire la fiche sur la l’émétophobie qui aborde aussi la phagophobie (peur de s’étouffer).

Et dans tous les cas, prenez soin de vous aussi en. cliquant sur ce lien. 

D’autres vidéos sont à consulter en suivant ces liens :

  • https://www.youtube.com/watch?v=wj3gq5iPaq4
  • https://www.youtube.com/watch?v=BHB2vtvXNAk
  • https://www.youtube.com/watch?v=agPdEJG9t_k&t=31s


Références

Auteurs

Laura LAVIALLE
Pédiatre

Anaël AYROLLES
Psychiatre

Coline STORDEUR
Psychiatre

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