J’allaite mon bébé, j’ai des questions pratiques à poser

Rédigé par E. Chenel (puéricultrice référente en allaitement), Dr AL. Virlouvet (pédiatre), Dr A. Heneau (pédiatre), Dr A. Frérot (pédiatre), Pr V. Biran (pédiatre) Service de réanimation et pédiatrie néonatale, hôpital Robert Debré, Paris. Remerciements à Sonia Philippot pour les illustrations

Fiches pour tous

Vous avez choisi d’allaiter. Cette fiche est destinée à répondre aux questions les plus fréquentes qui se posent durant l’allaitement. Elle fait suite à la fiche Je souhaite allaiter mon bébé, comment m’y préparer ?” qui regroupe des informations complémentaires pour vous aider à vous préparer à l’allaitement.

N’hésitez pas à solliciter un professionnel en cas de besoin.


# Comment savoir si mon enfant se nourrit suffisamment ?

Pour savoir si votre bébé se nourrit suffisamment, vous pouvez rechercher certains signes: 

-1- Urine et selles régulières À partir de la montée de lait, le nouveau-né doit mouiller au moins six couches par jour. Le méconium (premières selles de couleur noire) disparaît dans les 48 premières heures pour laisser place aux selles de transition (couleur verte puis jaune, texture grumeleuse). La fréquence des selles est variable d’un enfant à l’autre et s’espace avec le temps.

-2- Bonne prise de poids le poids du bébé est suivi par un professionnel de santé à la sortie de maternité (sage-femme, puéricultrice de PMI, pédiatre, médecin généraliste). Le bébé reprend son poids de naissance progressivement (entre 5 et 20 jours après la naissance) et la prise moyenne attendue est entre 15 et 40 g/jour.

-3- Fréquence des tétées régulières : entre 6 et 15 fois par 24 heures.

-4- Bruit et mouvement de déglutition: vous entendez ou vous voyez que votre bébé avale le lait et votre bébé semble satisfait et détendu après la tétée

-5- Souplesse des seins post-tétée :   vos seins sont plus souples après la tétée et votre bébé semble satisfait et détendu.

 

# Que faire si mon enfant ne grossit pas suffisamment ?

Il est normal que votre bébé perde jusqu’à 8 % de son poids de naissance dans les premiers jours suivant l’accouchement. Si, par la suite, il ne tète pas assez souvent et s’il ne retrouve pas son poids assez rapidement, voici quelques conseils :

-1- Le garder contre soi en favorisant un contact peau contre peau pour le stimuler à téter plus souvent.

-2- Vérifier qu’il tète et qu’il avale bien. Au début de la tétée, il a des mouvements de succion légers et rapides, et quand le lait se met à couler, la succion devient plus lente et plus profonde, vous entendez votre bébé déglutir.  

-3- Allaiter le bébé plus souvent, dès les signes d’éveil. Réveillez-le s’il dort plus de 4 heures d’affilée.

-4- S’il s’endort au sein, il est possible de comprimer légèrement votre sein pendant la tétée pour faire sortir un peu de lait et stimuler la poursuite de la tétée.

-5-  Proposer les deux seins lors de chaque tétée, le temps qu’il reprenne du poids.

-6- Si la quantité de lait semble insuffisante, il est possible d’exprimer le lait avec un tire-lait en fin de tétée pour stimuler la lactation. Il est parfois nécessaire de donner un complément (lait tiré, ou infantil) quand le bébé ne parvient pas à amorcer sa prise de poids. Différentes méthodes existent pour administrer le lait. Cela doit être accompagné par un professionnel pour ne pas perturber la mise en place de la lactation.

Il faut en particulier:

  • Vous alimenter et vous hydrater suffisamment. 
  • Vous reposer dès que possible.
  • Se rapprocher d’un professionnel : consultante en lactation IBCLC, sage-femme, gynécologue, pédiatre ou auprès de votre PMI. Certaines régions proposent des accompagnements téléphoniques.

 

# Est-ce normal de ressentir des douleurs durant l’allaitement?

Il est normal que les mamelons soient sensibles pendant les premières semaines, c’est une zone qui n’a pas l’habitude d’être autant sollicitée. Pour prévenir cette sur-sollicitation, il est possible d’appliquer directement du lait maternel sur les mamelons ainsi que des crèmes à base de miel ou de lanoline. Il existe également des dispositifs protecteurs tels que des cupules (ou coquilles) d’allaitement. Après ces débuts, l’allaitement ne devrait plus causer de douleur, en tout cas jamais plus des 10 premières secondes de tétée.

Si la douleur persiste, il faut en trouver la cause. Voici quelques pistes :

-1- S’assurer que la prise du sein est adéquate. Pour ce faire, attendre que le bébé ouvre grand la bouche, puis l’approcher du sein. Pour l’aider à ouvrir la bouche, il est possible de poser son menton contre le sein juste en dessous du mamelon. Sa bouche doit prendre une grande partie de l’aréole en plus du mamelon,  son menton doit toucher le sein et son nez doit être dégagé.

-2 – S’assurer que la position du bébé est adéquate. En position madone comme en position allongée, le ventre du bébé doit être contre celui de la mère, de face. Son oreille, son épaule et sa hanche doivent être alignées.  Si la position est bonne, il ne devrait pas y avoir de douleur. Si la douleur persiste plus d’une dizaine de secondes, il est préférable de retirer l’enfant du sein (pour cela : le faire lâcher le sein en remontant doucement avec le doigt un côté de sa lèvre supérieure ou en introduisant un doigt au coin de sa bouche entre ses gencives) puis recommencer la mise au sein.

-3- Si le bébé ne réussit pas à bien prendre le sein, ou que chaque tétée est difficile et douloureuse, il est temporairement possible de tirer le lait (manuellement ou à l’aide d’un tire-lait électrique) et donner ce lait au biberon ou autre contenant.

-4- Si les douleurs persistent au-delà de quelques jours, cela peut être dû à une complication : mauvaise position, crevasses, mastite, abcès, candidose… Il est conseillé de consulter un professionnel spécialisé en allaitement (sage-femme de proximité, PMI, consultants en lactation, ligne d’écoute dédiée à l’allaitement maternel, médecin formé à l’allaitement,…) 

  • “SOS Allaitement Ile-De-France” par les réseaux de périnatalité franciliens pour les femmes d’Ile-de-France Ligne téléphonique 0 800 800 315 (gratuit).

 

# Qu’est ce qu’une crevasse ? 

Les crevasses sont des gerçures qui apparaissent sur le mamelon suite aux tétées. Elles entraînent des douleurs importantes pendant et après la tétée. Leur présence signifie le plus souvent que votre bébé n’a pas la bonne position (position de la bouche et/ou corps entier) lorsqu’il tète. Se rapprocher d’un professionnel formé à l’allaitement maternel pour une aide au positionnement. 

Pour traiter ces crevasses:

-1- déposer en fin de tétée : 

  • Quelques gouttes de lait sur le mamelon et effectuer un massage doux
  • Une noisette de crème cicatrisante spécifique à base de miel stérile ou de lanoline 
  • Un mélange de crème cicatrisante et de lait

(Il n’est pas nécessaire de retirer la crème cicatrisante avant la tétée suivante)

-2- Eviter le frottement du mamelon sur le soutien-gorge : il est possible d’utiliser un coussinet d’allaitement en papier ou en tissu, un morceau de film alimentaire ou une cupule d’allaitement.

Avec les mesures correctives, les crevasses guérissent en quelques jours. 

 

# La poitrine est tendue, rouge, douloureuse, quelles sont les causes possibles ? 

-1-La montée de lait :

La douleur qui intervient 2 à 6 jours après l’accouchement est normale. Le corps s’active pour produire du lait en remplacement du colostrum, il y a un afflux de sang au niveau des seins, d’où la rougeur et la sensation de tension. Cette tension douloureuse peut durer environ 48 à 72 heures. Par la suite, les seins reprendront leur forme et la tension disparaîtra. L’inconfort est amélioré par l’écoulement de lait et la mise en place de compresses froides ou tièdes.

Pour aider à l’écoulement de lait :

  • Proposer le sein au bébé le plus souvent possible pour soulager cette tension ;
  • Masser l’aréole avant la tétée pour qu’elle soit plus souple et plus facile à prendre pour le bébé ;
  • Masser le sein avant la tétée et appliquer des compresses tièdes sur la poitrine pour favoriser l’écoulement du lait. La température des compresses est à adapter en fonction des sensations.

 

– 2-  Un engorgement : 

Si cet engorgement intervient alors que l’allaitement est déjà bien installé, c’est certainement que bébé a moins tété ce jour-là, ou que le lait a été moins exprimé. La poitrine peut alors être douloureuse, rouge, la peau brillante, et cela peut s’accompagner de fatigue importante, de frissons et de courbatures. 

Pour améliorer les symptômes, il faut reprendre le rythme de tétées habituel, si besoin en utilisant le tire-lait pour que le sein soit vidé plus efficacement. Cela devrait rentrer dans l’ordre en 2 jours. 

Si le phénomène perdure plus de 48 heures, qu’une rougeur, ou qu’une douleur ciblée apparaît sur un sein, il faut continuer à bien donner/vider ce sein, et se rapprocher d’un professionnel de santé formé en allaitement maternel (médecin formé à l’allaitement, sage-femme de proximité, PMI, consultants en lactation). Il se peut que l’engorgement ait évolué vers une mastite (infection causée par une bactérie), infection qui doit être traitée.

 

# Mon bébé demande à boire plus souvent qu’avant. Est-ce un manque de lait ? 

Il est possible que ce soit un pic de développement. Ils ont lieu aux alentours de 2 semaines, de 4 à 6 semaines, 3 mois et 6 mois de l’enfant. Votre bébé a alors besoin de boire plus de lait pendant une ou deux journées. Ce n’est pas parce que le lait n’est pas assez nourrissant, mais parce que votre enfant  grandit et que ses besoins changent.

Pour satisfaire l’appétit de bébé, les deux seins peuvent être transitoirement proposés à chaque tétée. Plus votre bébé tétera, plus la production de lait s’ajustera à ses nouveaux besoins. Pour passer le cap, il faut donner aussi souvent le sein que votre bébé le demandera, et éviter l’utilisation de complément car cela limitera l’adaptation de la production de lait.

 

# Comment s’alimenter pendant l’allaitement ?

Pendant l’allaitement, l’alimentation doit être suffisante pour que le corps se rétablisse de l’accouchement et pour qu’il produise du lait. Il est préférable qu’elle soit équilibrée, mais nul besoin qu’elle soit parfaite. Aussi, pour produire du lait en quantité suffisante, il suffit de manger à sa faim. C’est l’occasion de consommer des aliments qui n’étaient pas conseillés pendant la grossesse (ex : sushi, fromages non pasteurisés, charcuterie). Aucun aliment n’est à proscrire, le bébé réagit rarement à un aliment que sa mère a mangé. Les régimes ne sont pas recommandés pendant l’allaitement. Si l’appétit est respecté, la perte du poids pris pendant la grossesse se fera progressivement et sera favorisée par l’allaitement. 

Pour l’hydratation, boire suffisamment et écouter sa soif. Consommer une grande quantité de liquide n’augmentera pas la quantité de lait. Il est inutile de boire du lait pour produire du lait. 

La consommation d’alcool ou de drogues (cannabis par exemple) est formellement déconseillée pendant l’allaitement. Elle a un impact négatif sur le développement du bébé mais aussi sur l’écoulement du lait.

 

# Ai-je le droit de consommer des médicaments pendant que j’allaite ?

Il est rare de devoir arrêter l’allaitement à cause d’un médicament. La plupart des médicaments se retrouvent dans le lait maternel en très faible quantité, et sont donc compatibles avec l’allaitement. Toutefois, avant de prendre un médicament il faut en discuter avec un professionnel desanté (pharmacien, médecin, sage-femme, infirmière). Si un professionnel de santé conseille d’arrêter l’allaitement pour prendre un médicament, il faut vérifier avec lui s’il est possible de vous prescrire un autre médicament qui peut être pris tout en maintenant l’allaitement. 

Cependant, dans certaines situations, la pathologie maternelle nécessite un traitement incompatible avec l’allaitement. Si le traitement est transitoire, il est parfois possible d’entretenir sa lactation avec un tire-lait (et de jeter le lait) puis de reprendre l’allaitement après la fin du traitement.

 

# Comment initier l’allaitement si votre nouveau-né ne peut pas boire au sein ?

-1- L’expression manuelle pour les premiers jours. Elle est simple et peut être aussi efficace qu’un tire-lait. Elle nécessite une explication précise de la technique (personnel soignant formé, tuto vidéo…). Vidéo 1    Vidéo 2

2- Le tire-lait électrique : loué en pharmacie ou à un prestataire de service ou acheté. Les modèles sont multiples (fonctionnement sur batterie ou sur secteur), il est préférable d’utiliser une machine qui permet de tirer les deux seins en même temps (gain de temps considérable), et son poids est à prendre en compte si le tire-lait doit être transporté (reprise du travail, enfant hospitalisé, loisirs…).

3- Le tire-lait manuel : plus abordable à l’achat mais moins efficace, à réserver aux expressions ponctuelles. Il n’est pas conseillé pour la mise en place de la lactation en cas de prématurité car beaucoup moins efficace qu’un tire lait électrique. 

 


L’utilisation du tire-lait : 

Avant la montée de lait (qui intervient entre 2 et 6 jours après l’accouchement), seule la stimulation est suffisante (aspirations rapides) pendant 15 minutes, à réaliser environ toutes les 3h. Dès que 20 mL (l’équivalent d’une grosse cuillère à café) sont exprimés trois fois de suite, cela signifie que le corps s’est mis en action pour fabriquer du lait. Il faut poursuivre par des expressions de 15 à 20 minutes toutes les 3h. Certains tire-laits proposent des modes qui différencient la phase de stimulation et d’expression : stimuler par des aspirations rapides pendant environ 2 minutes, puis passer à un mode d’expression (aspirations lentes), pendant 15 à 20 minutes. D’autres ont uniquement un mode d’expression. Dans tous les cas, l’expression au tire-lait doit être confortable, en réglant la puissance d’aspiration selon les sensations et en adaptant la taille de la téterelle. Après l’expression, le sein devrait être plus souple, avec une sensation de sein vidé.

Les premiers jours qui suivent la naissance, il est normal de recueillir seulement de petites quantités de lait. Après une semaine de vie, il faut s’attendre à tirer entre 30 et 90 mL de lait à chaque expression. L’essentiel est de faire des expressions régulières (entre 6 et 10 expressions par jour, même la nuit), aussi souvent qu’un nouveau-né est alimenté. Les expressions lors ou après les séances de peau-à-peau ramènent souvent plus de lait.

 

# Comment poursuivre l’allaitement si votre enfant ne peut pas boire au sein ?

Si votre bébé ne peut pas boire au sein, parce qu’il est malade, hospitalisé, pendant une absence ou à la reprise du travail, le sevrage n’est pas obligatoire. 

Dans ce cas, il suffit de remplacer la tétée par une expression de lait aux horaires habituels des tétées. L’expression se fera avec un tire-lait électrique, ou ponctuellement manuellement. Le lait tiré sera conservé pour être donné frais (48h de conservation au réfrigérateur) ou pourra être congelé pour être donné plus tard (4 mois de conservation au congélateur). Cela nécessite de bien organiser son emploi du temps.

 

# Comment conserver le lait maternel ?

Il peut être mis dans des contenants en plastique rigide, en verre ou dans des sacs de congélation conçus pour le lait maternel.

Il peut être conservé :

  • 4 heures à température ambiante
  • 2 jours au réfrigérateur
  • 4 mois dans le congélateur à -18°C

Pensez à noter sur le contenant la date à laquelle le lait a été tiré afin d’utiliser le lait le plus ancien en premier.

 

# Comment décongeler le lait ?

Il peut être décongelé au réfrigérateur en le sortant la veille de son utilisation, ou, plus rapidement, dans un bol d’eau tiède. Il ne faut jamais mettre le lait à décongeler dans le micro-ondes, car la température n’est pas augmentée de manière uniforme avec un risque de brûlure pour l’enfant.

Une fois décongelé, si le lait n’a pas été chauffé, il se conserve 24 heures au réfrigérateur et 1 heure à la température de la pièce. Il ne doit pas être re-congelé, ni réchauffé plusieurs fois. Certains enfants préfèrent boire le lait maternel à 37°C. Pour cela, le lait se réchauffe au bain-marie ou au chauffe-biberon.

 

# Que faire du surplus de lait maternel ?

Les lactariums ont besoin en permanence de lait de donneuses. Il permet d’alimenter les enfants qui naissent prématurément et qui sont hospitalisés dans les services de néonatalogie.

En cas de surplus de lait maternel ou de lactation abondante, il est proposé de se  rapprocher du lactarium de sa région (Lactarium d’Ile de France : 01 71 19 60 47, [email protected]). Le lactarium vérifiera l’absence de contre-indication et précisera les modalités de recueil et de conservation. Un collecteur vient à domicile pour transporter le surplus de lait, qui sera ensuite pasteurisé et distribué dans les services de néonatalogie. 

 

# Comment envisager le sevrage ?

Il peut se faire de manière naturelle parce que votre enfant refuse le sein ou que la quantité de lait diminue. Le sevrage peut aussi être planifié. Pour que cette étape se déroule sereinement, il est préférable de se donner du temps, de rester flexible et à l’écoute de son enfant. 

Le sevrage se réalise graduellement, en retirant progressivement tétée par tétée : il peut donc nécessiter plusieurs semaines. Parfois, cela peut être plus rapide. 

# Si le sevrage se fait avant la diversification, il faut remplacer une tétée par un biberon puis quelques jours après une deuxième tétée par un deuxième biberon… Il est conseillé de remplacer les tétées du matin et du soir en dernier, ce sont celles qui sont les plus nutritives. Il est aussi possible de ne conserver de manière prolongée que celles-ci, par exemple à la reprise du travail. 

# Si le sevrage se fait après la diversification, les premières tétées à arrêter sont celles qui suivent les repas, à réaliser progressivement tétée après tétée. Les tétées à sevrer en dernier sont celles du matin et du soir. Selon l’âge de l’enfant, la tétée sera à remplacer par un biberon ou un laitage.

 

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